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Le groupe France Télécom, en tant que personne morale, a été mis en examen vendredi 6 juillet dans l'enquête sur la vague de suicides en 2008 et 2009 chez l'opérateur, a indiqué son avocate, Me Claudia Chemarin. Il s'agit de la première mise en examen pour ce chef d'accusation d'une entreprise du CAC 40.
Dans le détail, le groupe a été mis en examen pour "harcèlement moral" et "entrave au fonctionnement du comité d'entreprise et du comité d'hygiène et de sécurité" – des organes paritaires direction-syndicats – et placé sous contrôle judiciaire avec un cautionnement de 150 000 euros, a-t-on précisé de source judiciaire. Engagée dans des restructurations, l'entreprise avait supprimé 22 000 postes entre 2006 et 2008 et procédé à 10 000 changements de métier.
La plainte d'un syndicat de salariés fin 2009 suivie d'un rapport de l'inspection du travail en 2010 avaient conduit à l'ouverture d'une information judiciaire pour harcèlement moral en avril 2010. Selon les syndicats et la direction, 35 suicides de salariés de l'entreprise se sont produits en 2008 et 2009.
HARCÈLEMENT MANAGÉRIAL
Le rapport de l'inspection du travail mettait en exergue le harcèlement managérial dont étaient victimes les salariés qui avaient commencé leur carrière au moment où France Télécom était une entreprise publique non soumise à la concurrence, et qui étaient incités à changer de métier ou à quitter l'entreprise. Le groupe a "mis en œuvre des méthodes de gestion du personnel qui ont eu pour effet de fragiliser psychologiquement les salariés et de porter atteinte à leur santé physique et mentale", selon ce rapport.
M. Lombard avait dû quitter la direction opérationnelle de l'opérateur en mars 2010, fragilisé par cette vague de suicides. L'ancien patron a contesté tout lien entre ces suicides et les plans de réduction d'effectifs de l'époque.
"L'entreprise va enfin pouvoir se défendre deux ans après l'ouverture de l'enquête. France Télécom conteste avoir mis en place un système destiné à créer des souffrances chez ses salariés", a déclaré Me Chemarin.
Jeudi, l'ex-numéro deux du groupe, Louis-Pierre Wenes, et l'ancien directeur des ressources humaines, Olivier Barberot, ont été mis en examen et placés sous contrôle judiciaire avec à la clé une caution de 75 000 euros.
Lire : "Didier Lombard convoqué par le juge dans l'affaire des suicides"
L'ancien patron du groupe, Didier Lombard, à la tête de France Télécom de 2005 à 2010, avait été le premier dirigeant à être mis en examen mercredi, le cautionnement ayant été fixé pour lui à 100 000 euros.
DES PLANS "PAS DIRIGÉS CONTRE LES SALARIÉS"
Dans une tribune publiée dans les pages de notre journal, M. Lombard avait auparavant jugé qu'"à aucun moment les plans conçus et mis en œuvre par France Télécom n'ont été dirigés contre les salariés. Bien au contraire, ils étaient destinés à sauver l'entreprise et ses emplois".
"Je suis conscient que les bouleversements qu'a connus l'entreprise ont pu provoquer des secousses ou des troubles. Mais je conteste avec force que ces plans indispensables à la survie de l'entreprise aient pu être la cause des drames humains cités à l'appui des plaintes", écrivait-il.
Début avril, dans le cadre de cette enquête, des perquisitions ont été menées au siège parisien de France Télécom-Orange, suivies par des convocations d'anciens dirigeants à compter de ce mercredi.