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L'état d'urgence décrété en Tunisie
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Le président tunisien Béji Caïd Essebsi, le 28 juin 2015 à Tunis (c) Afp
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Tunis (AFP) - Le chef de l'Etat tunisien Béji Caïd Essebsi a décrété samedi l'état d'urgence, huit jours après un attentat sanglant qui a tué 38 touristes dans un contexte de menace jihadiste croissante.
"Le président décrète l'état d'urgence en Tunisie et s'adressera à la nation à 17H00 (16H00 GMT)", a indiqué à l'AFP la cellule de communication de la présidence, sans en préciser les raisons.
La mesure d'exception sera appliquée sur tout le territoire tunisien pour 30 jours renouvelables, a précisé à l'AFP le porte-parole de la présidence, Moez Sinaoui.
Les Tunisiens ont récemment vécu plus de trois ans sous état d'urgence, qui avait été instauré en janvier 2011, juste avant la fuite du président Zine El Abidine Ben Ali dans la foulée du soulèvement qui avait lancé "le Printemps arabe". Il avait été sans cesse renouvelé avant d'être levé en mars 2014.
L'état d'urgence accorde des pouvoirs d'exception aux forces de l'ordre. Il est décrété en Tunisie "soit en cas de péril imminent résultant d'atteintes graves à l'ordre public, soit en cas d’événements présentant par leur gravité le caractère de calamité publique".
Il donne notamment le droit aux autorités d'interdire les grèves et les réunions "de nature à provoquer ou entretenir le désordre".
Il autorise également les autorités à procéder à "des perquisitions à domicile de jour et de nuit et (à) prendre toutes mesures pour assurer le contrôle de la presse et des publications de toute nature".
- Interrogations -
La Tunisie, qui fait face depuis sa révolution à une progression de la mouvance jihadiste, responsable de la mort de dizaines de policiers et de militaires, a été frappée par deux attentats revendiqués par le groupe Etat islamique (EI) en l'espace de trois mois.
Cinquante-neuf touristes étrangers y ont péri: 21 au musée du Bardo, à Tunis, en mars, et 38 dans un hôtel en bord de mer à Port El Kantaoui le 26 juin.
L'annonce de la proclamation de l'état d'urgence plus d'une semaine après l'attentat suscitait samedi des interrogations en Tunisie.
"Pourquoi huit jours après? Y a-t-il de nouvelles informations sur un nouvel attentat? Et comment va-t-il être appliqué sur le terrain?", s'est interrogé l'analyste tunisien indépendant Selim Kharrat.
"Car l'état d'urgence peut être un excellent outil de répression. Cela dépendra de la volonté politique", a-t-il averti.
Le porte-parole de la présidence s'est voulu rassurant, en rappelant que la Tunisie avait déjà vécu sous état d'urgence pendant plus de trois ans. "A circonstances exceptionnelles, mesures exceptionnelles. (Mais) ce sera fait dans le respect de la loi, pour une durée déterminée", a assuré M. Sinaoui.
- Carences -
Après l'attentat de Port El Kantaoui, la Tunisie a annoncé qu'elle allait déployer des agents de sécurité armés supplémentaires pour sécuriser plages et sites touristiques.
"Plus de 1.400 policiers sont éparpillés à travers les zones touristiques pour protéger les hôtels" et les plages, a indiqué le Premier ministre Habib Essid vendredi à la BBC.
M. Essid a dans le même temps reconnu que la police avait été trop lente lors de l'attentat de Port El Kantaoui, premier aveu officiel de défaillances sécuritaires.
Et mercredi soir, jour de l'entrée en vigueur du plan "exceptionnel" annoncé par les autorités, le ministre de l'Intérieur avait lui-même constaté des carences à Hammamet, grande station balnéaire au sud de Tunis.
Les autorités ont par ailleurs annoncé l'arrestation de huit personnes, dont une femme, après l'attentat. M. Essid a précisé qu'il s'agissait d'"amis" du tueur qui vivaient avec lui à Kairouan (centre), où il étudiait, et de membres de sa famille originaires de Siliana (nord-ouest), la région où vivent ses parents.
Ils sont soupçonnés d'avoir "collaboré avec lui dans la préparation de son acte terroriste", selon M. Essid.
Samedi, les cinq dernières dépouilles de Britanniques tués dans l'attaque ont été rapatriées au Royaume-Uni. Outre les 30 victimes britanniques, trois Irlandais, deux Allemands, une Belge, une Portugaise et une Russe ont péri.
Selon les autorités tunisiennes, l'auteur de l'attentat, un étudiant de 23 ans, s'était formé au maniement des armes dans un camp en Libye, pays livré au chaos et séparé de la Tunisie par une frontière poreuse.