• 11. août 2012 - 23:20  lien

    Léopard d’Or pour «La Fille de Nulle Part»

    Le réalisateur Jean-Claude Brisseau, à l’heure des honneurs, avec son interprète principale Virginie Legeray.

    Le réalisateur Jean-Claude Brisseau, à l’heure des honneurs, avec son interprète principale Virginie Legeray. (Festival del film Locarno)

    Par Stefania Summermatter, Locarno (Collaboration: Christian Raaflaub), swissinfo.ch


    Avec l’attribution de la récompense suprême au film du Français Jean-Claude Brisseau s’achève la 65e édition du Festival de Locarno, la troisième dirigée par Olivier Père. Bilan mitigé pour la critique: bravo pour les films en compétition, mais programme décevant sur la Piazza Grande.


    L’attribution du Léopard d’Or à La fille de nulle part, du réalisateur français Jean-Claude Brisseau, n’a pas manqué de surprendre certains. «Malgré l’intérêt de l’œuvre, réalisée avec des acteurs non professionnels et un budget réduit, je trouve un peu étrange que Locarno récompense un réalisateur vétéran de 68 ans, avec déjà une longue carrière derrière lui, alors qu’à la base, ce devrait être un festival de la découverte», commente à chaud Antoine Duplan, critique cinématographique au quotidien romand Le Temps.
     
    Antonio Mariotti, du Corriere del Ticino, ne cache pas non plus sa perplexité. «Ce n’est certainement pas un film qui est resté dans le cœur des spectateurs. Le verdict du jury ne traduit pas une ligne cinématographique claire, et c’est plutôt décevant».
     
    Auteur notamment de Noce Blanche en 1989 (avec Vanessa Paradis et Bruno Cremer), Jean-Claude Brisseau raconte dans La fille de nulle part l’histoire de Michel, professeur de mathématiques à la retraite, qui vit seul depuis la mort de sa femme et occupe ses journées à l’écriture d’un essai sur les croyances qui façonnent la vie quotidienne. Un jour, il recueille Dora, une jeune femme sans domicile fixe, qu’il trouve blessée sur le pas de sa porte et l’héberge le temps de son rétablissement. Sa présence ramène un peu de fraîcheur dans la vie de Michel, mais peu à peu, l’appartement devient le théâtre de phénomènes mystérieux…


    Locarno retrouve une identité

    Passé la surprise du verdict, il semble bien que pour sa troisième édition en tant que directeur artistique, Olivier Père a réussi à marquer le Festival de sa patte. On remarque dans ses choix «l’empreinte d’un cinéphile véritablement complet. D’un côté, il prête une grande attention à l’histoire du cinéma - comme le montrent les belles rétrospectives organisées ces dernières années -, et de l’autre, il fait preuve d’une grande ouverture et accorde de la place à tous les genres cinématographiques», commente Antonio Mariotti.
     
    «Olivier Père a amené un nouvel esprit à Locarno, confirme Florian Keller, du quotidien zurichois Tages Anzeiger. Sa manière de parler de cinéma et de partager ce discours avec le public est intellectuellement très convaincante. Mais je ne crois pas pour autant qu’avec lui, le Festival soit entré dans une nouvelle ère. Il n’y a pas eu de changement de paradigme».
     
    Plus radical, Ugo Brusaporco, de La Regione Ticino, estime qu’Olivier Père «a redonné au Festival une identité forte, moins généraliste. Il a ouvert un discours extraordinaire sur le cinéma d’auteur. D’un certain point de vue, quelques-uns des films en compétition peuvent paraître déroutants, parce qu’ils ne correspondent pas aux normes d’un cinéma narratif et privilégient la recherche formelle et thématique. Mais ils réussissent néanmoins à émouvoir et à convaincre».


    Un cinéma d’auteur de facture européenne

    S’agissant du Concours international, la catégorie vedette du Festival, Antonio Mariotti juge que «sur 19 films en compétition, la moitié au moins étaient de grand intérêt. Ce sont surtout les réalisateurs européens qui sortent du lot, mais le niveau des films américains indépendants était bon aussi. Par contre, venant d’Asie et du reste du monde, je n’ai pas vu d’œuvres particulièrement émouvantes».
     
    Florian Keller aussi a apprécié le niveau général: «J’ai été très surpris par les films que j’ai vu, même si cette année, je n’ai pas pu suivre le Festival en entier. J’ai l’impression que le Concours a réussi à afficher un profil plus net».
     
    Pour Alessandra Levantesi, du quotidien italien La Stampa, «Olivier Père a fait montre d’un certain raffinement dans ses goûts et aussi de beaucoup de courage, en sélectionnant des films à cheval sur la fiction et le documentaire».
     
    Le bilan d'Antoine Duplan est plus mitigé. «J’ai trouvé le niveau de qualité très inégal. J’attendais plus des réalisateurs américains indépendants, mais les films présentés n’étaient pas vraiment pétillants, plutôt cyniques et mettant en scène de jeunes adultes immatures. Franchement, parfois, j’ai eu l’impression de perdre mon temps dans les salles».


    Les films qui ont marqué

    Ce sont avant tout trois films qui ont su faire battre le cœur d'Antoine Duplan et d’Antonio Mariotti, du Corriere del Ticino. «J’ai adoré Leviathan, de Véréna Paravel et Lucien Castaing-Taylor. C’est un documentaire totalement innovant, tourné avec une douzaine de microcaméras, qui raconte les difficultés auxquelles sont confrontés les pêcheurs en haute mer. L’image et le son sont simplement brillants», commente le journaliste du Temps.
     
    The End of Time, de l’helvético-canadien Peter Mettler, a également séduit nos critiques. «C’est un poème métaphysique sur le temps, un mantra, un film formellement splendide et intellectuellement très riche», poursuit Antoine Duplan. Sans oublier le film autrichien Der Glanz des Tages (de Tizza Covi et Rainer Frimmel), qui raconte la rencontre entre un vieil artiste de cirque et un jeune acteur, son neveu.
     
    Mais la sélection du Concours international comptait aussi deux catastrophes, estime Antonio Mariotti: «le film suisse Image Problem, de Simon Baumann et Andreas Pfiffner, est tendancieux, immature et à la limite de l’éthique et j’ai aussi trouvé décevant le film italien Padroni di casa, d’Edoardo Gabbriellini, où le niveau du scénario et la maîtrise de la narration laissent beaucoup à désirer».


    Une Italie trop «provinciale»

    Le cinéma italien est pour le moment le mouton noir du Festival. «Cela fait sept ans qu’il ne trouve plus sa place sur la Piazza Grande. Et dans la compétition, il n’y a plus eu de vraies découvertes. Peut-être qu’avec un travail plus en profondeur, on réussirait à avoir quelque chose de meilleur» note Antonio Mariotti.
     
    «Ce n’est pas que Locarno snobe le cinéma italien, mais c’est le cinéma italien qui préfère d’autres festivals», a déjà expliqué le directeur artistique Olivier Père. Une posture que la critique de La Stampa Alessandra Levantesi juge «provinciale, parce qu’à Locarno, un film indépendant peut jouir d’une meilleure visibilité qu’à Venise ou à Rome».
     
    «L’Italie est un pays extrêmement fermé du point de vue de la production et pauvre du point de vue de l’intelligence de la distribution, affirme sans détours Ugo Brusaporco, de La Regione Ticino. Les jeunes réalisateurs sont envoyés au casse-pipes à Venise ou à Rome, parce qu’on ne pense qu’au marché intérieur. Dans ce sens, la volonté d’Olivier Père de redonner une identité forte à Locarno permettra peut-être un retour de nouveaux auteurs italiens, des auteurs qui ont quelque chose à dire et qui ne se contentent pas de faire des ‘cinepanettone’.» [néologisme désignant en Italie la grosse comédie de fin d’année]


    Piazza Grande, peut mieux faire

    S’il reste beaucoup à faire sur le front italien donc, en trois ans, Olivier Père a réussi à faire venir à Locarno des grands noms du cinéma français et quelques stars internationales. «Avoir ici aussi son tapis rouge, cela ne veut pas dire singer bêtement les autres festivals, mais répondre à une demande d’un public qui évolue. Dans un certain sens, c’est aussi un retour aux origines, mais avec un œil plus critique sur le passé», note Antonio Mariotti.
     
    Il faudrait par contre repenser l’équilibre artistique de la programmation sur la Piazza Grande, qui «ne peut plus être seulement un rassemblement de public, mais doit trouver son identité, estime Ugo Brusaporto. On ne peut pas y passer ensemble un film important sur l’euthanasie comme Quelques heures de printemps, de Stéphane Brizé, et une comédie américaine potache et grivoise comme Bachelorette (de Leslye Headland)». Pour Antoine Duplan aussi, «la Piazza peut offrir à son public mieux que des films vulgaires ou violents de qualité médiocre».
     
    Le critique du Temps n’en tire pas moins un bilan positif de la présence suisse sur la Piazza Grande. «Le documentaire de Markus Imhoof sur les abeilles, More than Honey, est simplement beau, basé sur des recherches approfondies, émouvant et d’une grande qualité formelle. Nachtlärm, de Christoph Schaub, n’est pas mal non plus. Contrairement à d’autres films contemporains, il est basé sur un vrai scénario, écrit par Martin Suter. Plus léger par contre, le film de Michael Steiner, Das Missen Massaker, montre quand même le grand talent du metteur en scène de Grounding. Donc, si l’on excepte le calamiteux Image Problem, les films suisses sélectionnés à Locarno montrent une certaine vitalité et la qualité de notre cinéma».


    Stefania Summermatter, Locarno (Collaboration: Christian Raaflaub), swissinfo.ch
    Traduction de l’italien: Marc-André Miserez


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  • "Je me suis fait tout petit" : le partenaire de Vanessa Paradis impressionne !

    Mis en ligne le 11 juillet 2012 à 12h00par , mis à jour le 11 juillet 2012 à 16h26 
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    <figure class="visuel">Je me suis fait tout petit de Cécilia Rouaud<figcaption class="sz11 c2 tshadow2">Je me suis fait tout petit de Cécilia Rouaud / Crédits : Studio 37/Rezo Films</figcaption></figure>

    <section class="fleft" id="lside">

     

    </section> Vanessa Paradis est à l'affiche cette semaine du premier long métrage de la réalisatrice Cecilia Rouaud, une comédie de saison, où l'actrice chanteuse pétille aux côtés de Denis Menochet, Léa Drucker et Laurent Lucas.

    "Je me suis fait tout petit" offre à Vanessa Paradis, un nouveau rôle romantique après la comédie à succès, "L'arnacoeur", de Pascal Chaumeil (2010). L'histoire ? Plus rien ne retient Yvan à Paris. Il est prêt à partir... quand débarquent dans sa vie la belle Emmanuelle, qui fait des enfants comme elle tombe amoureuse, et Léo, le petit garçon que sa femme a eu avec un autre. Yvan va devoir changer ses plans.
     
    Un triomphe pour Denis Ménochet
     
    "Je me suis fait tout petit", de Cecilia Rouaud reçoit un accueil assez bienveillant de la presse. Le magazine Première y voit "une succession de petits bonheurs d'écriture, de rythme et d'interprétation" et loue en particulier la performance de Denis Ménochet, acteur révélé dans "Inglourious Basterds", de Quentin Tarantino et revu entre autres dans "Les adoptés", de Mélanie Laurent, "prodigieux de charisme et de virilité fragile".
     
    Même éloge dans Télé 7 Jours : "Denis Ménochet excelle à jouer le désarroi : son jeu, tout en nuances, imprègne pour longtemps la rétine". La critique ajoute que Vanessa Paradis y est "très drôle". Dans le JDD, on salue encore l'interprétation du comédien : "Denis Ménochet est touchant en papillon de l'existence." Mais le journaliste nuance : "Malheureusement, le côté artificiel de leurs personnages et des situations ne permet pas de s'attacher à eux".

     


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  • 07 août 2012 - 16H41  

    Alexandra Lamy et Jean Dujardin, le couple qui fait rêver les Français

    Alexandra Lamy et Jean Dujardin forment le couple qui fait le plus rêver les Français, devant Kate Middleton et le Prince William, Marion Cotillard et Guillaume Canet ou Michelle et Barack Obama, selon un enquête Harris Interactive pour le magazine Gala, à paraître mercredi.

    Alexandra Lamy et Jean Dujardin forment le couple qui fait le plus rêver les Français, devant Kate Middleton et le Prince William, Marion Cotillard et Guillaume Canet ou Michelle et Barack Obama, selon un enquête Harris Interactive pour le magazine Gala, à paraître mercredi.

    Le couple formé par Angelina Jolie et Brad Pitt n'arrive qu'en 5e position (9 %). Les couples qui font le moins rêver sont Charlène et Albert de Monaco (4%), Mélissa Theuriau et Jamel Debbouze, ces derniers à égalité avec Carla Bruni-Sarkozy et Nicolas Sarkozy (3%).

    Le couple formé par Angelina Jolie et Brad Pitt n'arrive qu'en 5e position (9 %). Les couples qui font le moins rêver sont Charlène et Albert de Monaco (4%), Mélissa Theuriau et Jamel Debbouze, ces derniers à égalité avec Carla Bruni-Sarkozy et Nicolas Sarkozy (3%).

    AFP - Alexandra Lamy et Jean Dujardin forment le couple qui fait le plus rêver les Français, devant Kate Middleton et le Prince William, Marion Cotillard et Guillaume Canet ou Michelle et Barack Obama, selon un enquête Harris Interactive pour le magazine Gala, à paraître mercredi.

    Unis à la ville comme à la scène, révélés en 1999 comme interprètes principaux de la série à succès "Un gars, Une fille" (France 2) où ils formaient un couple idéal, Alexandra Lamy et Jean Dujardin, cités par 17% des sondés, se sont mariés en juillet 2009.

    Selon 1.448 personnes représentatives de la population française de 18 ans et plus, interrogées en ligne entre le 30 juillet et le 2 août à partir d'une liste de dix couples, Marion Cotillard et Guillaume Canet (12%) font autant rêver que Michelle et Barack Obama.

    Le couple formé par Angelina Jolie et Brad Pitt n'arrive qu'en 5e position (9 %). Les couples qui font le moins rêver sont Charlène et Albert de Monaco (4%), Mélissa Theuriau et Jamel Debbouze, ces derniers à égalité avec Carla Bruni-Sarkozy et Nicolas Sarkozy (3%).

    Laëticia et Johnny Hallyday, Céline Dion et René Angélil arrivent dans les dernières positions de ce classement, ne faisant rêver que 1% des Français.

    Pour les hommes, Alexandra Lamy et Jean Dujardin sont toujours en tête, les femmes étant plus partagées entre Kate Middleton et le Prince William et Marion Cotillard et Guillaume Canet (16%).

    Les personnes âgées de 50 ans et plus considèrent que Michelle et Barack Obama suscitent le plus de rêve (17% des 50-64 ans et 16% des 65 ans et plus), devant Kate Middleton et le Prince William.

    Toutefois, 25% des personnes interrogées ne désignent aucun de ces dix couples comme porteurs de rêve, "cette proportion étant plus importante chez les hommes que chez les femmes (34% contre 17%) avec une tendance à augmenter avec l'âge, de 15% chez les plus jeunes à 30% chez les plus âgés", souligne Harris Interactive.


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    Jean-Paul Belmondo, le 19 juin 2012 à Bruxelles (Photo Eric Lalmand/Belga/AFP/Archives)

    Samedi 04 aout 2012, 22h50
    Jean-Paul Belmondo, 79 ans, qui n'avait plus tourné depuis "Un homme et son chien" de Francis Huster en 2010, va revenir sur les plateaux de cinéma avec Claude Lelouch, a annoncé le réalisateur samedi, en précisant qu'il s'agira d'une "comédie".

    "J'aurai le plaisir d'y mettre en scène une bande de vieux cons confrontés à une bande de jeunes cons", dit Claude Lelouch dans Le Parisien, interrogé en marge du festival de Nîmes "Un réalisateur dans la ville".

    Le "Magnifique" devrait y tenir le rôle principal, un fugitif qui tente de s'échapper mais dont l'évasion tourne mal et qui tombe d'un toit, "mais Claude Lelouch planche également sur deux autres films, toujours avec Jean-Paul Belmondo, et voudrait enchaîner deux tournages dans la foulée", a précisé de son côté à l'AFP la maison de production du réalisateur, Les films 13.

    Le handicap de Jean-Paul Belmondo a été intégré dans le scénario, a expliqué la même source, en faisant référence à l'accident vasculaire cérébral (AVC) dont a été victime la star en 2001.

    L'échec de "Un homme et son chien", dernier film dans lequel a joué le "Magnifique" sous la direction de Francis Huster, avait été largement attribué à son état de santé fragile à la suite de cet AVC, nombre d'admirateurs et de professionnels pensant alors qu'il ne tournerait plus aucun film.

    Dans plusieurs interviews lors de la promotion de "Un homme et son chien", Jean-Paul Belmondo avouait: "Oui je suis handicapé, j'ai perdu l'usage d'un bras et d'une jambe, je bute sur les mots, mais la mémoire est intacte et la bonne humeur aussi".

    Claude Lelouch, 74 ans, auteur, entre autres, de "Un homme et une femme", a dirigé à trois reprises Jean-Paul Belmondo : dans "Un homme qui me plaît" avec Annie Girardot (1969), "Itinéraire d'un enfant gâté" (1988) et "Les Misérables" (1994).

    "Claude, qui a réécrit le scénario pendant tout le mois de juillet, ne cesse de dire qu'il le (Belmondo) trouve en très grande forme. Sa méthode de tournage fait qu'il (Belmondo) se sentira très à l'aise", a ajouté la même source, en indiquant que le tournage devait avoir lieu "à Paris et en Normandie".

    Le nouveau long métrage de Claude Lelouch, dont le dernier film, "Ces amours-là" avec Audrey Dana, est sorti il y a deux ans, devrait s'intituler "Les Bandits manchots".

    Les acteurs Franck Dubosc, Aldo Maccione, Antoine Duléry, Audrey Dana et Charles Gérard, compagnon de route de "Bébel", devraient être ses acolytes.

    Claude Lelouch envisage de tourner dans la foulée deux autres films, "Salaud, on t'aime" et "L'Intime Conviction". Tous trois, "très différents" selon lui, auront "une séquence en commun".

    "Il a envie d'enchaîner au moins deux tournages mais cela dépendra de la disponibilité des comédiens. Le casting n'est pas complètement arrêté. On en saura plus début septembre", a ajouté la maison de production.


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  • Gore Vidal, mort d'un géant de la littérature américaine

    Créé le 01-08-2012 à 17h01 - Mis à jour à 17h20

     

     

    LOS ANGELES (Sipa) — Un géant de la littérature américaine disparaît. L'essayiste, romancier, dramaturge et scénariste Gore Vidal est mort mardi à l'âge de 86 ans. Personnage élégant, acerbe, immodeste et brillant, critique mordant de l'Amérique et ses politiques, il incarnait, comme Norman Mailer ou Truman Capote, cette dernière génération d'écrivains devenus des célébrités à part entière, aussi connus que les stars qu'il fréquentait.

    Gore Vidal s'est éteint chez lui, à Los Angeles, emporté par les complications d'une pneumonie, a annoncé son neveu Burr Steers. L'écrivain, qui vivait seul dans sa maison du quartier de Hollywood Hills, était malade "depuis un certain temps", selon son neveu.

    Son oeuvre compte une centaine d'essais notamment politiques, des best-sellers comme le roman historique "Lincoln" sorti en 1984 et "Myra Breckenridge et Myron", un roman comique, sans doute son plus inventif, sur une star de cinéma transexuelle, paru en 1968. Dans "Un garçon près de la rivière", publié en 1948, il avait été l'un des premiers auteurs à mettre en scène des personnages ouvertement homosexuels.

    Esprit frondeur et indépendant dans la tradition d'un Mark Twain, Gore Vidal était connu pour ses prises de positions tranchées, que ce soit sur la politique, la culture ou le sexe. Il n'épargnait pas les hommes politiques, vivants ou morts, raillait le puritanisme et la religion en général, et se montrait sans pitié avec ses pairs.

    Ironiquement, ce critique de longue date du militarisme américain, qui s'était opposé aux guerres du Vietnam et d'Irak, était né en 1925 à l'académie militaire de West Point dans l'Etat de New York où avait été formé son père.

    A la fin de sa vie, il avait dérouté ses fans en nouant une amitié épistolaire avec Timothy McVeigh, l'auteur de l'attentat d'Oklahoma City de 1995, exécuté en 2001. Il avait choqué en déclarant que McVeigh n'était pas plus un assassin que le président Dwight Eisenhower et en affirmant que l'administration Bush avait connaissance à l'avance des attentats du 11-Septembre.

    S'il conservait un sens de l'honneur à l'ancienne, Gore Vidal affichait une volonté très moderne de vivre loin des conventions de son époque. Dans ses mémoires, "Palimpseste", il revendiquait plus de mille "rencontres sexuelles", mais rien d'extraordinaire, selon lui, par rapport à John Kennedy ou Tennessee Williams. Il aimait l'alcool et pensait avoir goûté à toutes les grandes drogues. Il ne s'était jamais marié mais, pendant des décennies, avait vécu à Ravello, en Italie avec son compagnon Howard Austen, avant de rentrer aux Etats-Unis.

    Grand, racé et élégant, avec une voix de baryton, il était le plus éhonté et le plus chic de ces "name-droppers", qui adorent citer les noms des stars qu'ils fréquentent. Lui côtoyait Frank Sinatra, Marlon Brando, Paul Newman ou Hillary Clinton. Il était celui qui dînait avec Orson Welles à Los Angeles, déjeunait avec John et Jackie Kennedy en Floride, roulait en trombe dans les rues de Rome avec Tennessee Williams, donnait des coups de tête à Norman Mailer, emmenait Mick Jagger visiter la côte italienne ou faisait campagne aux côtés d'Eleanor Roosevelt ou Harry Truman.

    Cet érudit essentiellement autodidacte s'ennuyait dans les salles de classe. Sorti de la prestigieuse Phillips Exeter Academy, il était parti à l'armée et n'était jamais allé à l'université. Son premier roman, "Williwaw", publié à 20 ans, avait été rédigé sous les drapeaux.

    Gore Vidal avait ausis travaillé pour le théâtre, la télévision et le cinéma. Il est l'auteur de pièces comme "The Best Man", devenu "Que le meilleur l'emporte" au cinéma avec Henry Fonda, et des scénarios de "Soudain l'été dernier", adapté de Tennessee Williams, avec Elizabeth Taylor, ou "Le Gaucher" avec Paul Newman. Il avait aussi aidé William Wyler à écrire "Ben Hur", ajoutant à l'intrigue un contexte homosexuel sous-jacent, à l'insu de l'acteur principal Charlton Heston. Invité régulier des plateaux des talk-show à la télévision, il avait aussi joué les acteurs dans plusieurs films comme "Bienvenue à Gattaca" ou même le dessin animé "Les Simpsons".

    Il avait sans succès essayé de se faire élire, notamment en 1960, comme candidat démocrate au Congrès dans une circonscription de l'Etat de New York. Ami de Jacqueline Kennedy, il avait soutenu le président JFK dont il avait dressé le portrait dans la presse après son élection. Il expliquait que la fonction de chef de l'Etat était "littéralement tuante". Kennedy "pourrait très bien ne pas survivre", s'inquiétait-il.

    Malgré ses nombreuses activités, cet admirateur de Montaigne, Henry James et Edith Wharton se voyait avant tout comme un homme de lettres. En 1974, il avait contribué à faire découvrir l'écrivain italien Italo Calvino au public américain.

    ljg/sb/AP-v0/mw


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