• ANTOINE GALLIMARD PDG DES ÉDITIONS GALLIMARD

    « Je réfléchis à ouvrir le capital du groupe à hauteur de 10 % »



     

    Par Anne Feitz | 06/07 | 07:0lien

    Jean Paul GUILLOTEAU/EXPRESS-REA

    Jean Paul GUILLOTEAU/EXPRESS-REA

    Comment allez-vous intégrer Flammarion, qui va permettre au groupe Gallimard de doubler de taille ?

    Flammarion est une très belle société, dont la ligne éditoriale est très complémentaire de celle de Gallimard. Ses collections de livres d'actualité, pratiques, populaires, ou encore d'illustrés, prolongent bien notre activité, plus orientée vers la recherche littéraire. Il n'est donc pas question de casser cette belle entreprise : Teresa Cremisi, PDG de Flammarion, et ses équipes resteront en place, et garderont leur autonomie sur l'activité éditoriale. Pour autant, je veux constituer un véritable groupe et non garder deux sociétés côte à côte. J'engagerai donc avec Teresa Cremisi une réflexion sur les mutualisations possibles dans la fabrication, les achats de papier, les achats de licences, les espaces publicitaires...

    Qu'allez-vous faire des deux outils de distribution ? Et des deux collections de poche ?

    La question de la distribution va se poser. C'est un dossier sensible. Les deux structures sont viables et modernes, mais ne fonctionnent pas sous le même système informatique. L'outil de Flammarion, UD, travaille très bien : les dirigeants d'Actes Sud m'assurent d'ailleurs qu'ils lui resteront fidèles. Concernant les deux collections de poche, la question ne se pose pas. Elles ont des lignes éditoriales très différentes, bien identifiées, et seront maintenues. Notre collection Folio est plus orientée vers les classiques, les grands succès de la maison Gallimard, tandis que J'ai Lu, de Flammarion, a une dimension plus populaire, plus proche du lecteur, plus réactive. Certains auteurs, comme Fred Vargas, y sont très attachés. En outre, il n'y aura pas de problème de concurrence, puisque Folio détient 12 % du marché et J'ai Lu, 7 %.

    Le prix payé n'est-il pas trop élevé ?

    Nous avons effectué nos calculs sur des hypothèses de rentabilité raisonnables. Notre chiffre d'affaires a atteint 250 millions d'euros l'an dernier, celui de Flammarion 220 millions, et nous dégageons tous deux, bon an, mal an, un Ebitda d'environ 23 millions d'euros. Cette acquisition était pour moi une magnifique opportunité. Mon principal rival était en réalité le groupe RCS lui-même, s'il décidait de ne pas vendre. Cela dit, il est vrai que c'est un pari, alors que le secteur de l'édition est mature et que son évolution, avec l'arrivée du numérique, reste incertaine.

    Comment allez-vous financer l'acquisition?

    Je financerai un quart des 230 millions d'euros en cash, et les trois quarts par dette bancaire, apportée par BNP Paribas et Natixis, qui cherchent maintenant à la syndiquer. Je réfléchis aussi à ouvrir le capital de Madrigall, le holding qui détient 98 % du groupe Gallimard, à hauteur de 10 % environ. J'ai pris des contacts avec le FSI (Fonds stratégique d'investissement) et regarde vers d'autres investisseurs. La valorisation de Gallimard serait supérieure à celle de Flammarion, car nous détenons aussi de beaux actifs immobiliers. J'avais contracté une dette de 100 millions d'euros environ pour racheter les parts des minoritaires dans Madrigall, mais j'ai pu rembourser cette dette plus vite que prévu grâce à la magie « Harry Potter ».

    Pourriez-vous céder Casterman ?

    Casterman est un joli joyau, qui s'accorderait bien avec nos activités en bandes dessinées, notamment dans Futuropolis. Je vois un bel ensemble, qui permettrait aussi de mettre un pied dans l'audiovisuel. J'aimerais le garder, même si, dans un contexte de crise, je pourrais être contraint de le vendre pour faire face à mes échéances.

    Flammarion conservera-t-il ses 27 % dans le capital d'Actes Sud ?

    La décision appartient aux actionnaires d'Actes Sud, qui ont un droit de préemption sur cette participation en cas de changement de contrôle de Flammarion. Nous en avons parlé. S'ils décident de les racheter, je comprendrai et ne le vivrai pas comme un geste hostile.

    PROPOS RECUEILLIS PAR
    Écrit par Anne FEITZ
    Journaliste

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    Article publié le : jeudi 28 juin 2012 - Dernière modification le : jeudi 28 juin 2012

    L’Unesco place Tombouctou sur la liste du patrimoine mondial en péril

    Façade Est de la mosquée de Djingarey Ber avec son mirhab proéminent et au deuxième plan le minaret.

    Façade Est de la mosquée de Djingarey Ber avec son mirhab proéminent et au deuxième plan le minaret.

    T. Joffroy / Unesco

     

    Par Siegfried Forster

    Après les mots, les actes. Ce jeudi 28 juin, l’Unesco a décidé de placer Tombouctou, la ville malienne, sur la liste du patrimoine mondial en péril. Depuis que les islamistes ont pris le contrôle de La perle du désert fin mars, plusieurs profanations et destructions de lieus saints et monuments ont été enregistrées.

    A l’occasion de la 36e session du comité du patrimoine mondial qui se tient jusqu’au 6 juillet à Saint-Pétersbourg, en Russie, l’Organisation des Nations-unies pour la Culture a aussi inscrit un autre site au nord du Mali, le Tombeau des Askia, situé à Gao, sur la liste du patrimoine mondial en péril de l’Unesco. Ce site, édifié en 1495, lorsque Gao devint la capitale de l’Empire songhaï, est célèbre pour la spectaculaire structure pyramidale du tombeau et une mosquée. Il est reconnu comme patrimoine mondial depuis 2004. L’ensemble fut édifié après qu’Askia Mohamed eut fait de l’islam la religion officielle de l’Empire à son retour de La Mecque. Un site qui fait écho à la puissance et la richesse d’un empire qui fut bâti au XVe siècle, grâce au contrôle du commerce du sel et de l’or. Aujourd’hui, les jihadistes du Mujao ont pris le contrôle total de la ville.

    Selon la déclaration de l’Unesco, « la décision vise à favoriser la coopération et le soutien en faveur de sites menacés par le conflit armé qui affecte la région ». Depuis fin mars, l’Unesco avait multiplié les appels et les alertes pour mobiliser l’opinion publique et éviter une destruction du patrimoine sacré de Tombouctou. Depuis 1988, « la cité des 333 saints », fondée au XIe siècle par des tribus touarègues, est inscrite au patrimoine mondial, dont ses trois grandes mosquées et ses dizaines de milliers de manuscrits d’une valeur inestimable.
     
    Profanations, déstructions, trésors volés
     
    Malheureusement, la suite des événements avait donné raison aux observateurs les plus sceptiques.
    La directrice générale de l'Unesco avait appelé mi-avril à une action concertée des pays frontaliers du Mali pour empêcher le trafic de « trésors documentaires » de Tombouctou qui auraient été volés par les islamistes ayant pris le contrôle du nord du pays. Début mai, lorsque les forces armées avaient investi la ville de Douentza, ils ont détruit le monument Djina Dogon. Mi-mai, des islamistes d’al-Qaïda avaient profané le mausolée de Cheikh Sid Mahmoud. Le gouvernement de transition, mais aussi la classe politique et de nombreuses voix issues de la société civile avaient condamné cet acte comme « irréparable ». Des intellectuels avaient ensuite lancé un manifeste pour sauver les patrimoines des zones sous occupation. Le 23 mai, les islamistes d’Ansar Dine et d’Aqmi (Al-Qaïda au Maghreb islamique) avaient saccagé le monument des martyrs de Tombouctou pour détruire une représentation humaine et ainsi imposer leur vision religieuse à une société en guerre.
     
    Comme arriver à cette « coopération »
     
    L’action de l’Unesco était attendue, mais reste néanmoins insuffisante face au sentiment de la nécessité de mesures urgentes pour sauver le patrimoine mondial. Dans le cas de Tombouctou,
    une ville où la situation est décrite comme « catastrophique » par des habitants privés d’eau et d’électricité, comment arriver à cette « coopération » souhaitée avec des islamistes qui nient le fondement même de la notion d’un patrimoine mondial ? Comment arriver à des sanctions efficaces pour sauver le patrimoine dans un pays en guerre ? Force est de constater que, trop souvent, -même dans des cas beaucoup moins compliqués et dans des pays en paix –l’inscription sur la liste des sites en péril, n’avait pas permis d'obtenir ni la mobilisation souhaitée ni le sauvetage des sites.

     

    tags: Mali - Patrimoine

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  • La Part des anges : la presse se lève pour Ken Loach !

    Publié le jeudi 28 juin 2012

    Après un passage remarqué au dernier Festival de Cannes, La Part des anges, dernier né de Ken Loach, s'apprête à conquérir le public français. C'est plutôt bien parti avec une troisième place au box-office intermédiaire enregistré hier, jour de sortie. La presse suit le mouvement.

    La Part des anges : la presse se lève pour Ken Loach !

    Et de 30 ! Si l'on occulte son travail télévisuel et sa dizaine de documentaires, Ken Loach a signé son trentième film avec La Part des Anges. Cinéaste du réalisme social, l'Anglais a toujours mis un point d'honneur à conter des destins hors normes, comme autant d'allégories où il y a tout à apprendre. Et ce dernier né n'est pas en reste en présentant une intrigue original où de petits délinquants trouvent résilience dans… le whisky ! Sous le soleil malté, rien de véritablement neuf dixit une partie de la presse hexagonale. Pourtant, La Part des Anges demeure le film de la semaine pour d'autres (il fut aussi celui du Jury aux dernières festivités cannoises). En témoigne certains grands titres de notre revue de presse, plus encore notre critique.

    Pour Olivier De Bruyn dans
    Evene : Entre farce écossaise et thriller décontracté, La part des anges, via la métaphore du whisky, donne à voir des "gens de peu" qui apprennent à devenir plus malins que le système qui les exploite. Au final, la solution, amorale, ne concerne qu'une poignée de loosers touchés par la grâce et l'idéologie politique ne rentre pas en ligne de compte. Ken Loach est toujours lucide, mais pour une fois, il choisit de rêver avec ses personnages.

    Pour Christophe Carrière dans
    L'Express : Sa comédie est avant tout sociale. D'un réalisme irréprochable, elle embrasse joyeusement une situation grave (plus de 1 million de jeunes Britanniques au chômage), avec des comédiens, comme d'habitude chez le cinéaste, plus vrais que nature. En deux mots, tout cela est franchement intelligent.

    Pour Cécile Mury dans
    Télérama : Ken Loach rêve tout haut, avec un brin de naïveté, d'une revanche des pauvres, mais évite tout sermon assommant. Rien, dans cette équipée de branquignols au fin fond des Highlands, n'est pris trop au sérieux. La verve et le naturel des comédiens, filmés avec une empathie amusée, rappellent l'ambiance et la dérision des grandes comédies italiennes des années 1950.

    Pour Serge Kaganski dans
    Les Inrocks : Pas toujours bien écrit (le film met du temps à cerner son sujet dans une première partie laborieuse et plus alambiquée qu'une distillerie), bien dialogué et bien joué, mis en scène platement, obéissant à un programme breveté “public dans la poche” (les petits niquent les puissants), La Part des anges n'est ni indispensable ni honteux, resucée tardive des comédies populaires italiennes des années 50.

    Pour Pierre Vavasseur dans
    Le Parisien : Prix du Jury cette année à Cannes, La Part des anges n'est pas exempte de scènes cocasses dans un domaine pour le moins inattendu en matière de galéjades. Surtout, il maintient un vrai suspense et s'obstine à distiller de l'espoir.

    Pour Isabelle Regnier dans
    Le Monde : Le talent des acteurs, la qualité des répliques aident par ailleurs à oublier les faiblesses structurelles du film, dont on retient au bout du compte les gags les plus savoureux.

    Pour Isabelle Danel dans
    Première : Mi-comédie, mi-tragédie (la confrontation entre Robbie et un garçon qu'il a tabassé jadis est bouleversante), La Part des anges paresse un peu en cours de route. Mais le constat obstiné d'une Grande-Bretagne en déliquescence sociale sous-tend le portrait réjouissant d'une humanité complexe, incarnée par des acteurs aux trognes inénarrables et à la criante justesse.

     

     


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  • L'hommage d'Aurélie Filippetti à Robert Sabatier

    Créé le 28-06-2012 à 19h54 - Mis à jour à 20h18

     

    Un communiqué du ministère de la Culture et de la Communication vient de saluer la disparition de Robert Sabatier. Le voici.

     

    L'écrivain Robert Sabatier, ici en janvier 1970 à Paris, est mort ce jeudi 28 juin 2012 à Paris. Il avait 88 ans. L'un de ses condisciples à l'Académie Goncourt, Tahar Ben Jelloun, s'est dit très attristé par la perte d'un "homme d'une grande culture et d'une grande discrétion, doté d'une grande présence. Subtil et jamais véhément". (c) Afp

    L'écrivain Robert Sabatier, ici en janvier 1970 à Paris, est mort ce jeudi 28 juin 2012 à Paris. Il avait 88 ans. L'un de ses condisciples à l'Académie Goncourt, Tahar Ben Jelloun, s'est dit très attristé par la perte d'un "homme d'une grande culture et d'une grande discrétion, doté d'une grande présence. Subtil et jamais véhément". (c) Afp

     

    Hommage d'Aurélie Filippetti, ministre de la Culture et de la Communication, à Robert Sabatier

    Avec Robert Sabatier disparaît un enfant chéri du public, un étonnant raconteur d'histoires dont le nom restera lié aux «Allumettes suédoises», l'un des neuf volumes les plus célèbres du «Roman d'Olivier», cette belle série inspirée de ses premières années de vie de petit orphelin montmartrois.

    Pour les lecteurs, il était d'abord un maître du récit d'enfance: un univers où se libéraient son imagination poétique, sa gaîté frondeuse de Parigot ironique et tendre. Univers qu'il explorait encore à 80 ans avec cette même émotion et cette même attachante simplicité dans la narration du quotidien.

    C'était un écrivain protéiforme, un de ces autodidactes avides d'explorer les trésors de la langue française et d'apporter sa contribution sous forme d'essais critiques ou de dictionnaires savants. Derrière le masque bonhomme et les volutes de fumée de son éternelle pipe, il y avait l'un des meilleurs connaisseurs de la versification contemporaine, un excellent poète («Les châteaux de millions d'années», grand prix de poésie de l'Académie française) et l'auteur d'une monumentale «Histoire de la poésie française». Il y avait aussi l'amateur d'humour noir et d'aphorismes, contempteur féroce de la comédie humaine («Livre de la déraison souriante»). L'homme des séduisantes et perpétuelles surprises.

    Celui qui fut aussi président de la commission de l'aide à la création poétique et théâtrale du Centre national des Lettres devenu Centre national du Livre de 1978 à 1982, manquera aux métamorphoses de notre vie littéraire et au bonheur de notre langue.

    => Robert Sabatier, la mort d'un éternel orphelin

    => Le dernier roman de Robert Sabatier


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  • De "Kes" à "La part des anges" : Ken Loach, le révolté

    A l'occasion de la sortie de "La part des anges", sa dernière comédie sociale, retour sur la carrière de Ken Loach à travers quelques uns de ses films marquants.

    Par - publié le 28 juin 2012 à 00h01

     

    Ken Loach donne une définition claire de ses films : ils doivent maintenir la colère chez les gens. C'est pour réveiller les consciences endormies que Loach continue de tourner. Alors que "La part des anges", son dernier long métrage, sort en salles, retour sur la carrière d'un cinéaste qui depuis les années 60 cherche à capter le réel, notamment dans des documentaires surprenants pour l'époque car aux antipodes des mouvances et du clinquant Swinging London ("Up the Junction", en 1965 ; "Cathy Come Home", en 1966 ; et "In Two Minds" en 1967). Dès lors, il trouve son combat : dénoncer l'injustice sociale, s'attacher à des laissés-pour-compte, réparer et prévenir. Et cherche humblement à s'effacer derrière ses sujets et ses personnages, parfois incarnés par des acteurs non professionnels. Le succès vient avec "Kes", son second long métrage, ovationné au Festival de Cannes en 1970.

    Le début d'une carrière où la caméra deviendra une arme infaillible.

     

    KES (1969)
    Billy Casper vit dans une petite ville minière du nord-est de l'Angleterre, à Barnsley, dans le Yorkshire. Il a une douzaine d'années et l'univers dans lequel il vit ne correspond pas à son attente. Sa mère ne s'occupe guère de lui son frère aîné Jude le traite en souffre-douleur. Un jour, il déniche un jeune rapace et entreprend de le dresser. Deuxième film de Ken Loach : un classique du cinéma social qui a marqué toute une génération, comme naguère Allemagne, année zéro.

    FAMILY LIFE (1971)
    Inconsciemment ou non, Ken Loach réalisait l'un des plus grands films sur le mal-être adolescent, remettant en cause les valeurs traditionnelles. Ici, pas d'enrobage pop façon "Donnie Darko", "Ghost World" ou "Virgin Suicides" mais un vérisme cru à travers le parcours d'une jeune ado refusant obstinément les contingences d'un monde qu'elle juge hostile. Elle est impuissante et mélancolique car personne ne peut comprendre sa détresse, ni sa famille ni les médécins. Ce qui choque Ken Loach ici, c'est l'absence totale d'empathie et de communication. Sa charge contre les institutions frappe fort. Très fort, même aujourd'hui. Incontestablement un des sommets dans la carrière de Loach.

    REGARDS ET SOURIRES (1981)
    Deux amis viennent de quitter le collège de Sheffield, ancienne capitale de l'acier ou le travail est devenu rare. Une seule issue, l'armée. L'un part tandis que l'autre reste, son père s'opposant a son départ... Avant la traversée du désert des années 80 (le cinéma anglais en crise), Ken Loach signe une œuvre prophétique sur l'embrigadement des jeunes avec un style mélancolique hérité de ses premières œuvres.

    RIFF-RAFF (1991)
    L'adaptation d'un jeune Ecossais tout juste sorti de prison à la vie des bas quartiers de Londres où il va trouver du travail comme manœuvre et une petite amie avec laquelle il va tenter d'affronter les aléas de la vie citadine. Ken Loach met le doigt sur l'exploitation dans le monde du travail en évoquant les conditions de salubrité faites aux ouvriers du bâtiment. Un pamphlet anti-thatchériste qui au fil des années a gagné une dimension universelle...

    RAINING STONES (1993)
    A travers l'histoire de la famille Williams et de son chef Bob, au chômage depuis de long mois, une évocation de la misère ordinaire des populations vivant à la périphérie de Manchester. Avec "Raining Stones", Ken Loach retrouve le scénariste Jim Allen (déjà sur "Hidden Agenda"), participe au renouveau du cinéma social à l'anglaise avec d'autres (Mike Leigh, le réalisateur de "Naked") et scrute les répercutions catastrophiques de la politique conservatrice de Margaret Thatcher sur une population décimée par le chômage et le libéralisme. Plus que jamais, il s'affirme comme un cinéaste engagé. Du cinéma-vérité à l'état brut. Prix du jury au festival de Cannes.

    LAND AND FREEDOM (1994)
    Une évocation dense de la guerre d'Espagne, à travers l'histoire d'un vieil homme que sa petite-fille enterre à Liverpool. Il suffit juste de créer un lien entre la Guerre d'Espagne et ce qui se jouait alors en Angleterre pour comprendre où Ken Loach veut en venir, adossant ici franquistes et communistes. L'idée, c'est de montrer comme un espoir utopique se révèle une cruelle déception. En dépit des apparences et du changement de lieu et de contexte, malgré quelques scories démonstratives, c'est du pur Loach à la fois dans la mise en scène (style sec) et le discours (opposition du groupe et de l'individu) jusque dans le refus du manichéisme et du jugement hâtif. Il y passe un vent de révolte finalement contemporain. Prix de la critique internationale à Cannes et Prix œcuménique.

    LE VENT SE LEVE (2006)
    Irlande, 1920. Des paysans s'unissent pour former une armée de volontaires contre les redoutables Black and Tans, troupes anglaises envoyées par bateaux entiers pour mater les velléités d'indépendance du peuple irlandais. Par sens du devoir et amour de son pays, Damien abandonne sa jeune carrière de médecin et rejoint son frère Teddy dans le dangereux combat pour la liberté. Nouvel affrontement ancestral pour Loach (les Britanniques et les Irlandais) renouant ainsi avec la veine de "Hidden Agenda" qui traitait déjà du conflit en Irlande du Nord - sur un mode toutefois bien différent. Une œuvre tragique, d'une terrible évidence. Palme d'or au Festival de Cannes en 2006.

    IT'S A FREE WORLD (2007)
    Angie se fait virer d'une agence de recrutement pour mauvaise conduite en public. Elle fait alors équipe avec sa colocataire, Rose, pour ouvrir une agence dans leur cuisine. Avec tous ces immigrants en quête de travail, les opportunités sont considérables, particulièrement pour deux jeunes femmes en phase avec leur temps. Nouvelle autopsie d'une working class déchiquetée où deux femmes actuelles incarnent les dérives du capitalisme. Dans cette affaire âpre de revanche sociale, les anciens dominés deviennent les nouveaux dominants et subissent bon gré mal gré les conséquences morales de leurs actes. Avec, à la clé, une fracassante révélation : Kierston Wareing.

     

    Ken Loach Venise 2007

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