Les enquêteurs belges sont quasi certains d’avoir identifié les deux personnes basées en Belgique avec qui les auteurs des attentats de Paris ont longuement échangé des SMS dans la soirée du 13 novembre 2015.
Ce n’est pas une surprise : il s’agit des deux hommes qui font l’objet d’un avis de recherche lancé dès le 4 décembre dernier.
Les deux hommes disposaient de fausses cartes d’identité belges, au nom de Samir Bouzid et de Soufiane Kayal. Ils ont disparu de la circulation. La police ignore leur identité réelle, ainsi que leur nationalité. Mais cette information souligne le rôle central qu’auraient joué ces deux coordinateurs dans les attentats qui ont fait 130 morts et 350 blessés.
D’apparence plus âgés que les assaillants, assurant la logistique à partir de Bruxelles et de ses environs, contrôlés le 9 septembre à la frontière austro-hongroise en compagnie de Salah Abdeslam et en provenance de Budapest, ces deux hommes semblent avoir joué un rôle pivot dans des attentats extrêmement bien préparés, ordonnés par l’État islamique à partir de la Syrie.
C’est à eux qu’un des assaillants du Bataclan, utilisant un téléphone Samsung retrouvé dans une poubelle, envoya le SMS : "On est parti, on commence" dans la soirée fatidique à 21 h 42.
Comme l’a détaillé le quotidien Le Monde, qui a eu accès aux 6.000 procès-verbaux de l’enquête, cette ligne, ouverte au nom de Salah Abdeslam, avait été activée le 12 novembre à 22 h 24 et sera fermée juste après la réception du fameux texto. Entre-temps, vingt-cinq échanges ont eu lieu avec le Samsung.
Le soir des attentats, Abdelhamid Abaaoud a reçu d’un autre numéro belge un appel d’une personne géolocalisée au même endroit où se trouvait le destinataire du SMS du Bataclan.
Les deux suspects ont aussi transféré le 17 novembre, dans une agence de la Western Union en région bruxelloise, la somme de 750 euros à Hasna Ait Boulahcen, la cousine d’Abdelhamid Abaaoud, tous les deux tués lors de l’assaut de Saint-Denis. De là sont tirées les images de surveillance.
Enfin, le rôle central des deux hommes apparaît encore dans le fait qu’ils ont été contrôlés à la frontière austro-hongroise bien avant les attentats, le 9 septembre, dans une Mercedes où avait pris place également Salah Abdeslam, en provenance de Budapest.
À ce jour , les enquêteurs ont retrouvé trois planques en territoire belge d’où ont été préparés les attentats. L’une d’elles a été révélée par l’avis de recherche du 4 décembre : il s’agit d’une maison louée à Auvelais.
Les enquêteurs s’intéressent aussi beaucoup à Ahmed Dahmani, un ressortissant belge de 26 ans qui est toujours aux mains de la police turque. Son départ subit pour la Turquie, via Amsterdam et en direction d’Antalya, au lendemain des attentats, intrigue. Avait-il été, lui aussi, pressenti comme kamikaze à Paris ? Dahmani avait voyagé avec Abdeslam en août, faisant l’aller-retour dans un ferry entre Bari pour Patras.
Au bout du compte , les enquêteurs ont acquis la conviction que l’opération de Paris était préparée "depuis plusieurs mois", de façon minutieuse. Les exécutants sont venus de Syrie, ramenant en Europe les techniques militaires apprises dans ce pays.
Salah Abdeslam "n’est pas sorti par l’armoire"
En décembre , des médias, se fiant à des sources apparemment crédibles, avaient émis l’hypothèse que le suspect avait échappé à l’attention d’une large perquisition effectuée le lundi 16 novembre au 47, rue Delaunoy à Molenbeek en se cachant dans une armoire au cours d’un déménagement. L’histoire belge a évidemment fait le tour du monde…
Cette hypothèse ne tient pas la route , affirme une source proche de l’enquête. "Tout ce qui sortait et rentrait dans cette maison était surveillé de près" , dit-elle. "Il n’est pas sorti par l’armoire."