<article class="article article_normal" itemscope="" itemtype="http://schema.org/NewsArticle">
<figure class="illustration_haut " style="width: 534px">
</figure>
La semaine s’avère cruciale pour Michel Platini. « Dans quelques jours », le président de l’Union des associations européennes de football (UEFA) devrait connaître la « décision » du comité d’éthique de la Fédération internationale de football (FIFA) le concernant. A l’instar du patron de la FIFA, Joseph Blatter, l’ex-meneur de jeu des Bleus est visé par une enquête formelle de l’instance, qui doit vraisemblablement l’interroger. Tout comme le patriarche du football mondial, l’ancien capitaine de l’équipe de France risque une suspension. Il serait alors contraint de démissionner de ses fonctions à la tête de l’UEFA et serait par ailleurs inéligible. Par conséquent, le triple ballon d’or (de 1983 à 1985) ne pourrait pas briguer la présidence du gouvernement du football mondial. Le dépôt des candidatures est prévu le 26 octobre.
Lire aussi : FIFA : Platini sous la menace d’une suspension
Grandissime favorite dans la course à la succession de M. Blatter, l’icône est désormais tributaire du jugement dudit comité d’éthique « indépendant », réputé pour avoir blanchi à de nombreuses reprises le dirigeant de l’organisation mondiale. La menace est donc réelle pour Michel Platini. D’autant que de nombreux observateurs voient dans cette spirale infernale la marque du président de la FIFA, animal politique à sang froid, désireux de barrer la route de son ancien protégé et de lui faire payer ses appels à sa démission, le 28 mai, en plein scandale de corruption et à la veille de sa réélection pour un cinquième mandat.
Comment Michel Platini s’est-il retrouvé dans cette fâcheuse posture ? L’enquête du comité d’éthique fait suite à l’ouverture par le ministère public de la Confédération helvétique (MPC), le 24 septembre, d’une procédure pénale à l’encontre du patron de la FIFA pour « soupçon de gestion déloyale et — subsidiairement — abus de confiance ».
Paiement déloyal de 2 millions de francs suisses
Le MPC reproche notamment à M. Blatter « un paiement déloyal de 2 millions de francs suisses » (1,8 million d’euros) en faveur de M. Platini, « au préjudice de la FIFA, prétendument pour des travaux effectués entre janvier 1999 et juin 2002 ». A l’époque, Michel Platini officiait comme « conseiller football » de M. Blatter avant de siéger, dès juin 2002, au comité exécutif de la FIFA et d’en devenir le vice-président.
Selon le MPC, ce paiement a été effectué en février 2011. « On a affaire à une accusation d’emploi fictif avec un versement effectué neuf ans après les faits », explique au Monde un fin connaisseur des arcanes de la FIFA. Ce versement a été effectué un mois avant que M. Platini ne soit réélu pour un second mandat à la tête de l’UEFA, et quatre mois avant que son homologue de la FIFA ne soit reconduit pour la troisième fois à la tête de l’instance mondiale, avec le soutien discret de la Confédération européenne. Les médias anglais n’ont pas tardé à exhumer les vieux dossiers, rappelant la consigne de Michel Platini appelant les cinquante-trois membres de l’UEFA à voter en bloc pour M. Blatter. A l’époque, le Suisse avait promis à l’ex-joueur qu’il s’agirait de son dernier mandat. Un accord qu’il n’a pas respecté quatre ans plus tard.
Au début de 2011, le Qatari Mohamed Ben Hammam, patron de la Confédération asiatique, avait vainement cherché l’appui du Français avant de défier le président sortant de la FIFA dans les urnes. Le 29 mai 2011, l’outsider avait été suspendu par le comité d’éthique pour « fraude électorale » et n’avait pu se présenter face au Valaisan, réélu sans adversaire pour un quatrième mandat.
Statut de « personne appelée à donner des renseignements »
En marge de la réunion du gouvernement de la Fédération internationale, le 25 septembre, Michel Platini et Sepp Blatter ont été entendus par le MPC, qui a rappelé le principe de la présomption d’innocence. Si le dirigeant helvète a été auditionné en qualité de « prévenu », Michel Platini avait le statut de « personne appelée à donner des renseignements (PADR)». Un statut intermédiaire qui, selon l’article 178 du Code de procédure pénale helvétique, signifie que le sexagénaire « pourrait s’avérer être soit l’auteur des faits à élucider ou d’une infraction connexe, soit un participant à ces actes ». Une perquisition a par ailleurs eu lieu dans le bureau du dirigeant de la FIFA et « des données ont été saisies ».
Lire aussi : FIFA : l’enquête autour de Joseph Blatter fragilise Michel Platini
« En ce qui concerne le paiement qui a été effectué en ma faveur, je désire clarifier que ce montant m’a été versé pour le travail que j’ai accompli de manière contractuelle pour la FIFA, s’est justifié Michel Platini dans un communiqué. Je suis satisfait d’avoir pu éclaircir ce point envers les autorités. » « Ce paiement est étrange, s’interroge un ancien pilier de la FIFA. Platini va devoir trouver une bonne explication. » Par le biais de son entourage, M. Platini a fait savoir qu’il n’aurait pensé à réclamer son dû à la Fédération internationale que neuf ans après ses « travaux ». Résidant à Paris lorsqu’il officiait comme « conseiller technique » de M. Blatter, il aurait par ailleurs payé des impôts sur la somme incriminée.
Lundi 28 septembre, Michel Platini a envoyé un e-mail aux présidents des cinquante-quatre fédérations européennes qui participeront, en février 2016, à l’élection du futur patron de la FIFA, afin de donner des explications sur ce versement controversé de 2011 et de sauver sa campagne.
Platini dit avoir « entièrement déclaré ces revenus »
Dans sa missive, Platini précise :
« Pendant la période de 1998 à 2002, j’ai été employé par la FIFA pour travailler sur un large éventail de questions relatives au football. Il s’agissait d’un travail à plein temps et mes fonctions étaient connues de tous. Ma rémunération a été convenue à ce moment-là et après que des paiements initiaux ont été effectués, le solde final de 2 millions de francs suisses a été versé en février 2011. »
Le triple Ballon d’or assure avoir « entièrement déclaré ces revenus aux autorités, conformément à la loi suisse ». « Les autorités suisses m’ont interrogé à ce sujet vendredi passé, non pas en tant que personne accusée de quoi que ce soit, mais simplement en qualité de personne appelée à donner des renseignements », insiste le Français de 60 ans.
En introduction de sa lettre, M. Platini se dit « conscient que dans cette affaire, il y a de la spéculation sur des faits qui (le) concernent personnellement », insistant sur le fait qu’il n’a « pas été accusé d’un quelconque acte répréhensible », motivant sa missive « pour des raisons de transparence ».
Joseph Blatter a, lui, réuni dans la journée les salariés de la FIFA pour leur dire qu’il ne quitterait pas ses fonctions avant l’élection de son successeur en février 2016. Il a aussi, selon un communiqué signé par ses avocats, expliqué aux magistrats qui l’ont entendu que les paiements faits à M. Platini étaient « une rétribution justifiée et rien d’autre, et qu’ils ont été correctement inscrits dans les comptes de la FIFA, y compris les retenues des charges pour la Sécurité sociale ».