Le texte des ministres des Finances de la zone euro (détaillé ci-dessous et conditionnant une reprise du dialogue sur le renflouement de la Grèce) est "très mauvais" mais Athènes en discute et veut si possible lancer vite les négociations pour sauver ses banques, a indiqué une source gouvernementale grecque.
"Le texte dans son ensemble est très mauvais. Nous essayons de trouver des solutions", a expliqué cette source à propos du document européen qui évoque l'option d'une "sortie temporaire" de la Grèce de l'euro et consacre des abandons de souveraineté en échange d'une éventuelle aide.
Si un compromis est trouvé, la Grèce veut un feu vert à la reprise des négociations sur son renflouement sans attendre, au vu de la "gravité" de la situation de ses banques, à court de liquidités, a-t-elle ajouté.
"Nous ne voulons pas de délai" à la reprise des négociations jusqu'à mercredi, comme le propose l'Eurogroupe, "car en attendant, il n'y a pas assez de liquidités de la BCE (injectées dans les banques grecques, ndlr) et la situation est grave (...). Jeudi serait trop tard", a insisté cette source. Le président de la BCE, Mario Draghi "le dit lui même", a-t-elle avancé.
Pour la Grèce, les autres principaux points de blocage sont sur le rôle du FMI, "que les Allemands veulent faire participer à un troisième plan de renflouement" contrairement à ce que veut Athènes, et la question de l'allègement de la dette grecque.
Le Premier ministre grec, Alexis Tsipras, qui veut un "reprofilage" a eu un "vif désaccord" avec la chancelière Angela Merkel a ce sujet lors d'une rencontre à quatre, avec les présidents français François Hollande et du conseil européen, Donald Tusk, selon cette source.
L'allié gouvernemental de M. Tsipras, le ministre de la Défense Panos Kammenos, l'a lui appelé à rejetter les propositions européennes: "Ils veulent nous écraser, cela suffit" a tweeté ce dirigeant de droite souverainiste.
Aux chefs d'Etat de trancher, clivage franco-allemand
Vers 18h dimanche, le sommet a été suspendu afin d'organiser une rencontre bilatérale entre Alexis Tsipras, Angela Merkel, François Hollande et Donald Tusk. Finalement, après une heure de discussion, le sommet a repris avec tous les chefs d'Etat. Ceux-ci, à partir des documents élaborés par l'Eurogroupe plus tôt dans la journée (et à découvrir ci-dessous) doivent décider de lancer, ou non, de nouvelles négociations avec Athènes sur un troisième plan d'aide, condition sine qua non pour éviter au pays une sortie de la zone euro.
Si Alexis Tsipras avait annoncé en arrivant à la réunion qu'un "accord était ce soir possible si tout le monde le veut" et qu'il fallait "œuvrer pour tous ceux qui ne veulent pas voir l'Europe divisée", un clivage franco-allemand laissait présager de délicates discussions. Si François Hollande assurait que "la France allait tout faire pour trouver un accord ce soir", la chancelière allemande Angela Merkel a quant à elle fourni un tout autre message en affirmant "ne pas vouloir d'accord à tout prix" et que "les principes devaient être respectés". "La valeur la plus importante, à savoir la confiance et la fiabilité, a été perdue" avec Athènes, ajoutait-elle encore.
(-> plus d'infos sur cette grave crise au sein du couple franco-allemand)
Une sortie temporaire de la Grèce de la zone euro reste une option
Les ministres des Finances de la Zone euro ont transmis après leur réunion dimanche aux chefs d'Etat un document qui évoque noir sur blanc l'option d'une "sortie temporaire de la zone euro" de la Grèce, et veulent lui imposer une mise sous tutelle en échange d'une éventuelle aide.
"En cas d'échec à trouver un accord, la Grèce se verrait proposer de négocier rapidement une sortie temporaire de la zone euro, avec la possibilité de restructurer sa dette", selon ce document obtenu par l'AFP. Ce passage figure entre crochets pour signifier qu'il n'a pas emporté l'adhésion de tous les ministres et qu'il revient aux chefs d'Etat de trancher dans la soirée dimanche, mais c'est la première fois qu'une telle option est aussi clairement évoquée.
La nouvelle liste des exigences imposées à Athènes
<article class="MediaCard MediaCard--mediaForward customisable-border" data-scribe="component:card" dir="ltr"> </article>Here's the list of reforms in the #Eurogroup draft that Greek government has to pass by Wednesday to get bailout
Le document de quatre pages rédigé par l'Eurogroupe dimanche ( et à découvrir en intégralité en cliquant ici - partagé par le quotidien grec I Kathimerini) est le résultat des 15 heures de négociations pied à pied des ministres et des institutions européennes déchirées entre les partisans d'une ligne dure avec Athènes, et les colombes.
Illustration de ces désaccords: onze passages de ces quatre pages sont entre crochets.
Au final, l'Eurogroupe exige plusieurs mesures d'Athènes, dont des abandons de souveraineté puisque la Grèce devra soumettre aux institutions certains projets de loi avant de les passer au Parlement.
Un éventuel programme d'aide à la Grèce évalué entre 82 à 86 milliards d'euros
L'Eurogroupe s'est au moins accordé pour estimer qu'un troisième plan d'aide à la Grèce devrait peser entre 82 et 86 milliards d'euros et pour demander à la Commission, au FMI et à la BCE d'essayer d'alléger cette enveloppe en travaillant sur la fiscalité grecque ou les privatisations exigées d'Athènes.
En revanche, il n'y a pas eu de consensus sur l'épineuse question de la soutenabilité et d'une éventuelle restructuration de la dette grecque, le passage étant lui aussi entre crochets:
"Dans le contexte d'un éventuel programme (...), l'Eurogroupe se tient prêt à envisager de possibles mesures additionnelles pour adoucir le service de la dette grecque, si nécessaire" par un rééchelonnement. En revanche un réduction pure et simple est exclue.
Le document dresse une liste des exigences imposées par l'Europe à la Grèce, et là encore, il n'y a pas eu de consensus sur tout.
La Grèce doit voter des lois d'ici mercredi
L'Eurogroupe demande à Athènes de légiférer en urgence - soit d'ici ce mercredi 15 juillet - sur certains dossiers chauds, pour "reconstruire la confiance" entre les créanciers et Athènes.
Il s'agit notamment de légiférer sur la TVA, les retraites, la procédure civile, l'indépendance de l'Office grec des statistiques. Ces nouvelles lois seront un préalable à la reprise des discussions pour un plan d'aide.
Dans le cadre de cette négociation à venir, "les propositions de réformes grecques doivent être considérablement renforcées pour tenir compte de la forte détérioration économique et budgétaire du pays", selon le document.
Il s'agit schématiquement de libéraliser l'économie, en modifiant par exemple les règles en vigueur dans le secteur énergétique, les retraites, le marché du travail, celles régissant le travail du dimanche, les périodes de soldes, sur les boulangeries ou le commerce du lait...
L'Eurogroupe a ajouté quatre exigences: plus de privatisations (garanties éventuellement grâce à un fonds de 50 milliards d'euros composé d'actifs publics grecs), réduire le coût de l'administration, faciliter le travail de surveillance des institutions internationales, et imposer un droit de regard des institutions sur les projets normatifs grecs.
"Le gouvernement doit consulter et obtenir l'accord des institutions sur tout projet de loi dans certains domaines importants (...) avant de de le soumettre à une consultation publique ou au Parlement", selon le texte. Enfin, Athènes doit revenir sur certaines des mesures adoptées depuis la victoire électorale de Syriza eu début de l'année 2015 (ce dernier point n'ayant pas fait l'objet d'un consensus de l'Eurogroupe).
À noter que pour le 20 juillet , le gouvernement grec devra présenter une première proposition concernant la modernisation et le renforcement de l'administration grecque, de même qu'un programme pour la dépolitiser, en collaboration avec la Commission européenne
"Il est évident que certains pays ne veulent pas d'un accord avec la Grèce"
Des sources au sein du gouvernement grec estiment "évident que certains pays" européens ne veulent pas qu'un accord soit trouvé pour sauver Athènes de la banqueroute, rapporte dimanche l'agence de presse grecque ANA. "Il est évident que certains pays, pour des raisons qui n'ont rien à voir avec les réformes et le programme, ne veulent pas d'un accord", déclarent ces sources citées par ANA.
Elles affirment que les ministres des Finances de la zone euro s'étaient mis d'accord sur "un calendrier pertinent" et qu'un "accord de principe" avait été trouvé, mais qu'un "groupe de pays ont soulevé la question de la 'confiance', sans toutefois préciser ce qui devrait être fait".
"Il y a plusieurs pays qui bloquent" et ne veulent pas d'un troisième plan d'aide, a résumé une source européenne, alors qu'Allemagne et Finlande, deux faucons vis-à-vis d'Athènes, semblent près de dire ouvertement qu'ils ne veulent plus de la Grèce dans la zone euro. Rappelons toutefois que la Finlande seule ne peut pas bloquer un troisième plan d'aide ( tous les détails ici ).