• Reconnaître un harceleur moral

    Personne n’ignore aujourd’hui ce que l’on entend par harcèlement sexuel, mais il en existe une autre forme, moins repérable, plus insidieuse : le harcèlement psychologique. On le rencontre le plus souvent dans le cadre du travail. Quelles sont les stratégies du harceleur ? Comment lui faire face ?

    Selon une étude de la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail (1998), 1,9 millions de français auraient été victimes de harcèlement professionnel en 1997. Dans une proposition d'avis émis en avril 2001, le Conseil économique et social (CES) propose d'ailleurs que les conséquences de ce harcèlement soient assimilées à une maladie professionnelle.

    De quoi s’agit-il ?

    Harceleur moralDans son livre*, Marie-France Hirigoyen définit le harcèlement professionnel de la façon suivante : "Toute attitude abusive se manifestant notamment par des comportements, des paroles, des actes, des gestes, des écrits pouvant porter atteinte à la personnalité, la dignité ou à l’intégrité physique ou psychique d’une personne, mettre en péril l’emploi de celle-ci ou dégrader le climat de travail." Le harcèlement professionnel peut s’exercer entre collègues de même niveau hiérarchique (mise au ban d’une personne) mais, le plus souvent, il est le fait d’un supérieur sur son subordonné ; pour celui qui en est la victime, l’enjeu est alors important et les conséquences souvent dramatiques.

    Les stratagèmes du "harceleur"

    Ce qui rend le "harceleur" particulièrement nuisible, c’est qu’il n’agit jamais à découvert et exerce son impitoyable violence à "bas bruit". Avant même d’avoir compris ce qui lui arrive, sa victime ne peut plus s’exprimer, ni se défendre car ce qu’elle subit est impalpable, indicible.

    En public, le "harceleur" use de son charme et de ses grandes facultés d’adaptation pour gagner l’auditoire et provoquer sa victime en toute impunité, par petites touches à peine perceptibles : sous-entendus humiliants, humour sarcastique, faux-semblants de civilité, de brimades à répétition, agressions non verbales (gestes, regards méprisants, soupirs)...

    Ses propos, ses reproches sont souvent si flous qu’ils laissent la place à toutes les interprétations possibles ; il manie le demi-mensonge et le paradoxe à merveille et ne s’explique jamais directement sur rien. Il ne communique pas car lui seul sait ce qu’il y a à dire et à penser...

    Attaques en privé

    Envahie par la peur et la culpabilité ("Qu’ai-je fait de mal pour mériter ça ?"), souvent isolée du reste du groupe, sa victime est tétanisée, privée de ses ressources habituelles. Mais c’est encore en privé que le "harceleur" s’avère le plus terrifiant, surtout si sa victime a des velléités de rébellion : injures grossières, attaques sur la personne, son physique, son intimité, menaces (de renvoi, de perte de salaire, de mort quelquefois)... Sans témoin, tout lui est permis ; il exerce alors sa terreur sans retenue. Menacée dans son statut, son emploi, mais aussi dans son être, sa victime est acculée, impuissante ; si ce "jeu" dure trop longtemps et que rien ne vient l’aider à réagir, elle n’aura bientôt plus les moyens de se soustraire à son agresseur.

    Autant dire qu’à ce stade, les intérêts de l’entreprise et ceux du groupe ne sont plus de mise. Ce qui se "joue" tient de la pathologie du "harceleur" (la perversion) et le but qu’il poursuit est en marge de tout "bon sens". 

    Quand le masque tombe…

    Derrière le visage du harceleur se cache un être avide de reconnaissance et de pouvoir. Pour les conserver ou masquer son incompétence, il est prêt à éliminer tout ce qui pourrait y faire obstacle. Il va alors choisir une victime, un "bouc émissaire", pas comme on le croit souvent, quelqu’un de plus faible que les autres mais plutôt quelqu’un de consciencieux, de lucide et donc inquiétant pour lui.

    Le harceleur excelle dans l’art de détecter le point faible, la faille qu’il va pouvoir exploiter pour anéantir les défenses de sa victime ; c’est là qu’il va l’attaquer s’appliquant à insinuer le doute (en elle et chez les autres) sur ses compétences, sa valeur personnelle. Ceci jusqu’à ce qu’elle perde tous ses moyens. Empêché de penser, de comprendre, de réagir, l’agressé est poussé à la faute, ce qui justifie à la fois l’attitude de l’agresseur et le silence de l’entourage.

    Si rien ne vient lui faire obstacle, les choses ne cesseront qu’avec la capitulation de la victime (départ, longue maladie pour dépression, troubles psychosomatiques graves…).

    Pour se sentir le plus fort, le harceleur a besoin d’un autre à tenir en son pouvoir. S’il ne peut le corrompre, il lui faut le réduire à néant. C’est difficile à concevoir, mais c’est à transformer sa victime en marionnettes, à la dévitaliser, à l’anéantir, qu’il trouve sa plus grande jouissance.

    Comment s’en sortir ?

    Le mieux est d’agir avant que le processus ne soit trop engagé. Refusez autant que possible de rester dans le flou : demandez des précisions sur les consignes ou les tâches qui vous sont assignées, si possible toujours en public et avec insistance. Dévoilez le sens caché des allusions "avec humour" notez par écrit les provocations, les brimades, et tout ce qui vous désarçonne avant que ça ne devienne trop confus... Ceci peut vous aider à ne pas "perdre le nord"et à garder en tête que vous êtes dans votre bon droit.

    Il faut également éviter l’isolement. Cherchez des alliances parmi vos collègues, sans en attendre de témoignages (le harceleur les terrorise et les muselle peut-être aussi). Il est rare que le harceleur n’ait pas déjà sévi. Auquel cas, il reste certainement des traces qui pourront vous aider à analyser la situation. Cherchez un appui du côté de la hiérarchie ou du médecin de l’entreprise : le harceleur est souvent terrorisé par l’idée d’être découvert ou d’être soumis à une loi. Savoir que l’on est prêt à se défendre, que l’on a des appuis (ou du moins qu’on en cherche), peut considérablement freiner son action.

    Si le processus est déjà fortement engagé, il est préférable d’agir plus radicalement, en prenant de la distance : arrêtez de travailler le temps qu’il faudra pour vous y retrouver mais faites-le dans la plus stricte légalité. Faites-vous accompagner par un psychothérapeute qui vous aidera à faire la part des choses, à sortir de la peur et de la culpabilité, à comprendre comment vous avez été pris au piège et à ne plus vous y laisser prendre.

    Enfin, si un départ est inévitable, battez-vous pour que ça se passe dans les meilleures conditions possibles ; vous n’avez pas à payer le prix de la "folie"du harceleur !

    Dominique Pir - Mis à jour le 10 février 2009


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  • dunkerque@lavoixdunord

    mardi 08.11.2011, 05:13 - La Voix du Nord

    • BAILLEUL : Harcèlement à l'officede tourisme : délibéréle 2 décembre

     

    Le tribunal correctionnel de Dunkerque a longuement examiné hier matin le dossier dans lequel comparaissait Christophe Fruleux, président de l'office de tourisme de Bailleul, accusé de harcèlement moral par la directrice de la structure, Laurence Boulogne, qui a par ailleurs été présidente du conseil de prud'hommes d'Hazebrouck.

    Après près de six heures de débats, le jugement a été mis en délibéré au 2 décembre.

    Christophe Fruleux a dû faire face à un feu nourri de questions du président Paul-Henri Boulanger, du procureur Philippe Muller, du bâtonnier Bruno Dubout, qui intervenait pour Laurence Boulogne, et même de Me Simon Pérot, qui défendait deux salariés de l'office de tourisme qui étaient poursuivis dans ce dossier pour dénonciation calomnieuse. L'avocat de la caisse primaire d'assurance maladie, également partie civile, ne l'a pas épargné non plus.

    Philippe Muller a requis six mois de prison avec sursis et 10 000 E d'amende contre Christophe Fruleux car, a-t-il dit, «  c'est grave, parce que personne n'a le droit de commettre telles violences morales, qui sont peut-être plus graves que les violences physiques. (...) On ne peut pas impunément faire du management sur le dos des employés.  » Il a requis deux peines d'amende avec sursis de l'ordre de 500 E contre les deux employés de l'office de tourisme poursuivis pour dénonciation calomnieuse envers Laurence Boulogne.

    Me Pérot a plaidé la relaxe pour les deux employés, qu'il a décrits comme pris entre le marteau et l'enclume.

    Me Caroline Belval s'est attachée à démontrer que Christophe Fruleux serait en fait tombé dans un piège tendu par la plaignante : «  Le grand naïf, c'est qui ? C'est mon client !  »

    On saura le 2 décembre si ces arguments ont été entendus par le tribunal.


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  • <article class="actus-details">

    Licenciée pour faute grave pour avoir refusé de nouvelles fonctions

    <header class="info">

    Contexte de l'affaire

    Une salariée est engagée le 4/09/2000 en qualité d’aide maternelle et personnel d’éducation par un organisme de gestion de l’enseignement catholique.

    Elle est licenciée pour faute grave le 6/12/2006.

     

    Contestant son licenciement, la salariée saisit le Conseil de prud’hommes.

    Pour la salariée, l’employeur a procédé à une modification de son contrat de travail et son licenciement pour le refus qu’elle a opposé n’est pas licite et la faute grave retenue non conforme aux dispositions légales.

    Pour l’employeur, il n’y avait eu en aucun cas modification du contrat de travail, mais une demande d’assurer des fonctions qui relevaient de la qualification de la salariée.

    Dans la lettre de licenciement, l’employeur rappelait d’ailleurs la demande qui avait été faite à la salariée et sa réaction virulente. 

    aux termes de la lettre de licenciement du 6 décembre 2006, est motivée dans les termes suivants : " lors de l'entretien préalable auquel nous vous avons convoqué le 29 novembre dernier, nous vous avons entendu sur votre attitude des 24 octobre, 6 novembre et 7 novembre dernier.

    En effet à ces dates et donc à trois reprises vous avez refusé d'accomplir une tâche comprise dans le cadre de votre fonction et parfaitement intégrée à celles qui relèvent de votre contrat de travail. (Aide en maternelle et personnel d'éducation). En vous demandant d'assister les enfants de CP pendant leur prise de repas en cantine et de surveiller les élèves de primaire sur la cour de récréation jusqu'à leur entrée en classe en début d'après midi, le chef d'établissement, par cette directive, n'apportait aucune modification à votre contrat de travail puisque vous assuriez ce même service et aux mêmes heures avec les enfants de la classe Maternelle ! Cette attitude assortie de propos véhéments et que vous n'avez pas voulu modifier malgré les représentations de la Directrice et du Président de …, a conduit à une mise à pied à titre conservatoire qui vous a été signifiée par LRAR le 7 novembre. N'ayant perçu aucun signe d'apaisement dans vos propos lors de l'entretien préalable mais bien au contraire l'affirmation de votre volonté de ne pas varier dans votre attitude de refus, je suis au regret de vous signifier par la présente votre licenciement pour faute grave "

    La cour d’appel déboute la salariée de sa demande, mais cette dernière décide de se pourvoir en cassation. 

    La Cour de cassation confirme le jugement de la Cour d’appel et rejette le pourvoi.

    Le licenciement pour faute grave est donc totalement licite pour les juges de la Cour de cassation. 

    Mais attendu que la cour d'appel a fait ressortir que la tâche demandée à la salarié et refusée par celle-ci n'était pas étrangère à sa qualification professionnelle ; qu'elle a pu en déduire que le refus d'exécuter des travaux relevant de ses attributions rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait ainsi une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;

    PAR CES MOTIFS :

    REJETTE le pourvoi ;

    Cour de cassation du <time datetime="1970-01-01T01:00:00+01:00" pubdate="">22/06/2011, pourvoi n°10-11718 </time>

    Commentaire de LégiSocial

    Cette affaire rappelle une fois de plus qu’il est important de savoir faire la différence entre :

     

    Lorsqu’un employeur n’apporte que des modifications des conditions de travail, le refus du salarié peut conduire à son licenciement pour ce motif, y compris pour faute grave (comme dans cette affaire).

    Lorsqu’un employeur souhaite modifier un contrat de travail, le refus du salarié ne peut être en aucun cas invoqué comme représentatif d’une faute motivant son licenciement.

    Nombreuses sont les affaires jugées par la Cour de cassation dans lesquelles les juges ont eu à se prononcer afin de savoir s’ils se trouvaient face à une modification du contrat de travail ou une modification des conditions de travail.

    L’affaire que nous traitons en l’espèce s’est donc soldée par un licenciement pour faute grave, motivé par le refus de la salariée d’effectuer des tâches relevant de son champ de compétences.

    Cette affaire peut être mise en parallèle d’une affaire similaire jugée en 2010 par la Cour de cassation :

    Modification du contrat de travail pour changement partiel des tâches ? 

    Au sein d’une banque, l’employeur demande à 2 salariées d’effectuer de nouvelles tâches commerciales en complément de leurs activités habituelles.

    Ce changement de fonction se fait à hauteur de 30% de leur temps de travail. 

    Les salariées refusent ce changement au motif que cela constitue une modification du contrat de travail.

    L’employeur les licencie pour faute grave. 

    Les salariées saisissent le Conseil de prud’hommes. 

    La Cour de cassation déboute les salariées de leur demande, considérant qu’en l’espèce il y avait uniquement modification des conditions de travail et que cela correspondait au pouvoir habituel d’un employeur vis-à-vis de ses salariées. 

    Par contre, la Cour de cassation indique que le licenciement ne pouvait se faire sur le motif d’une faute grave (comme elle l’avait déjà indiqué dans un jugement du 11/05/2005 n° 03-41753) mais pour une cause réelle et sérieuse. 

    Cour de cassation du 12/05/2010 arrêt 09-41007 D

    Extrait du livre : Abécédaire social et paye 2011 (Éditions INDICATOR)

     

    </header></article>

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  •  

    Harcèlement moral au travail

    le Lundi 7 Novembre 2011 à 14:50

    Moïse dit être harcelé moralement au travail. Son patron lui a demandé de ne plus venir et lui a retiré son badge.

     

    Il lui a signifié que c’était un licenciement à l’amiable et à sa grande surprise, Moïse vient de recevoir une lettre de licenciement pour faute grave au motif d’absence non justifiée et abandon de poste

    Il nous dit qu’il était en CDI dans cette entreprise depuis 13 ans et nous demande ce qu’il peut faire. 

    Maître Frédéric FRIBURGER, avocat au barreau de Marseille, lui répond.

     


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  • harcèlement moral au travail ; positionnement des médecin du travail , de la CPAM ...

     
    Bonsoir,

    Victime de harcèlement moral - au regard du Code du travail -effectué par un de mes supérieurs, je me retrouve en fait complètement abandonné à mon sort / à la reconnaissance de cette situation et des effets sur ma santé, puisque ni le médecin-conseil, ni l'expert, ni le médecin du travail admettent ce qui s'est réellement passé et les conséquences que cela a entrainé pour moi. Le médecin généraliste ne fait guère le poids contre tous ces professionnels qui nient l'évidence. Seul l'inspecteur du travail a pris position pour me soutenir sans pour autant évoquer dans ses écrits le terme de harcèlement moral.

    Que faire, d'une part pour que la vérité éclate et que les faits soient enfin reconnus et que la responsabilité de mon supérieur soit reconnue?Comment fait-on pour se reconstruire lorsqu'on au sein des organismes sociaux le harcèlement moral reste tabou et que le sujet est d'emblée rejeter?
    Le fait que, à l'intérieur de la CPAM, certains font le choix de nier l'évidence et la souffrance des salariés, s'avère en fait un double traumatisme pour la personne harcelé. Comment ne pas comprendre alors que certains craquent et décident de mettre fin à leurs jours? Comment faire pour que le harceleur ne continue pas sur d'autres salariés en toute impunité?

    Biensûr, je ne me permettrrai pas de généraliser. Il ya heureusement des salariés de la CPAM et des médecins du travail qui agissent en toute honnêteté. Merci à eux, ils se reconnaitront.
    Mais tout de même, on se retrouve trop facilement face au déni qui crève les yeux à tel point qu'elles en sont même ridicules, toutes ces personnes qui osent dire qu'on est au pays des Bisounours et qu'on raconte n'importe quoi.

    Désolé de mettre le pavé dans la marre; mais c'est le cri du coeur : je viens d'apprendre qu'une collègue s'est suicidée, après avoir tentée durant plusieurs mois de faire face au harcèlement commis par la même personne. La direction évoque déjà ses problèmes personnels...

    Concrètement , qu'est-ce qu'on peut faire pour être entendus et reconnus en tant que salariés victimes de harceleur? Que peut-on faire pour qu'au sein de la CPAM le harcèlement moral soit enfin reconnu? A quand une reconnnaissance en tant que maladie professionnelle? Que faire pour que les médecins du travail écoutent les salariés en souffrance et prennent les décisions qui s'imposent - pourtant prévues poar le Code du travail- pour protéger ces salariés en danger ?

    Bonsoir.

    Kémaïs       
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    Dernière modification par Kémaïs ; Aujourd'hui à 20h13.

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