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Par marialis2.2 le 13 Novembre 2011 à 06:20
publié le 13/11/2011 à 05:00 lien
Société « Une morale intermittente »
L’enseignant et philosophe, auteur d’un Petit éloge de la gentillesse, redonne ses lettres de noblesse à cette valeur délaissée.
Emmanuel Jaffelin : « La gentillesse est un abandon de soi partiel. » Photo DR
Cette Journée de la gentillesse a dû vous valoir bien des appels ?
Emmanuel JAFFELIN : « Je ne suis pas gentil que le 13 novembre et je m’autorise à ne pas l’être le 13. Je défends une morale de l’intermittence. J’y oppose les morales impressionnantes, qui sont issues des monothéismes ou des sagesses païennes, qui nous obligent à nous porter tous les matins à des hauteurs vertigineuses. Je fais le constat que ces morales ont échoué. Tout le monde ne peut être un saint ou un sage. La gentillesse n’est pas quand on doit, c’est quand on veut et quand on peut. Je prône une morale impressionniste, par petites touches. »
La gentillesse ne semble pas être une valeur d’aujourd’hui, mais vous dites que si.
« Elle est une valeur de tout temps maisdans notre société. Nous sommes passés du couple noble-vilain au couple bon-m elle est surtout une forme d’intelligence négligée échant puis au gentil-cynique. Dans notre monde cynique, chacun veut instrumentaliser autrui et utilise pour ce faire le visage de la gentillesse, la douceur. Je montre que la gentillesse est un pouvoir doux, l’intelligence par la douceur : là, le but est d’être doux, mais elle ne devient pas un moyen. Elle est la fin et le moyen. »
Je peux réussir en société même si j’ai un comportement gentil ?
« Cela dépend de ce que vous appelez réussir. S’il s’agit de prendre la place de votre collègue, pas forcément. Il n’est pas exclu que vous soyez victime de la même logique, plus vieux. Vous aurez réussi votre vie sur une certaine période. Je crois qu’on ne réussit pas sa vie dans le cynisme. On la réussit par la bienfaisance, dont la gentillesse est un visage. Notre société ne valorise pas la bienfaisance. Une étude de sociologues américains montrait que les gentils en entreprise ne réussissaient pas. Cela me paraît une analyse fausse parce qu’elle ne prend la vie de l’individu que sur une période. Etre gentil n’est pas une forme de faiblesse. »
Le gentil dit oui à tout ?
« Pas du tout ! C’est une force, une morale du pouvoir. Je ne suis jamais pris en faute. Il y a des circonstances dans lesquelles je ne peux pas être gentil. Quand vous prenez le métro à Paris, vous ne faites pas la charité à tous les mendiants. La gentillesse est une forme d’intelligence qui répond à la demande que formule autrui, mais pas à toutes les demandes. »
La route est un exemple récurrent de manque de gentillesse, non ?
« La route est l’image même du cynisme, où on arrive à être soi en dominant autrui. Ne pas laisser passer un piéton ne permet pas de gagner du temps. La gentillesse est une occasion de se siphonner soi-même, de s’oublier au profit d’autrui. »
Petit éloge de la gentillesse, François Bourin éditeur. 14 €.
Propos recueillis par Ju. B.
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Par marialis2.2 le 13 Novembre 2011 à 03:55
Cinq bonnes raisons de dévorer le dernier BHL
MRY
(Atlantico, le 8 novembre 2011, article de MRY)
J’ai lu le livre de Bernard-Henri Lévy, “La Guerre sans l’aimer” (Grasset, le 9 novembre). Il est passionnant pour cinq raisons.
1. C’est un page-turner, un polar, un mélange de John Le Carré et des Trois Mousquetaires. On va d’un dialogue surréel avec un aviateur de l’Otan qui menace de bombarder en route, par mer, vers Misrata à une rencontre à Paris avec Jean-François Copé ou des intellectuels syriens. On va d’une scène de guerre à une réunion nocturne à l’Elysée avec le Général Younes ramené par le philosophe à la chemise blanche dans son avion personnel. On découvre des portraits de feu Kadhafi et de son fils Sayf jamais lus ailleurs. C’est palpitant, c’est drôle, c’est inattendu, c’est bondissant, c’est bourré de rebondissements. Rien de philosophique, totalement accessible à tous.
2. C’est la première fois, à ma connaissance, qu’on nous permet de plonger ainsi dans les coulisses du pouvoir et même dans les coulisses du pouvoir par excellence qu’est le pouvoir militaire. Je ne vais pas entrer dans le détail car les récits valent le coup et ce serait dommage de vous priver du plaisir romanesque de la découverte. Mais, vous êtes dans la Control Room. Les décisions stratégiques et tactiques, les secrets d’Etat, vus de l’intérieur. On voit Sarkozy dialoguer avec Obama. On le voit dire de Silvio Berlusconi: “c’est à se demander s’il a encore un cerveau”. Mais, surtout, on est aux premières loges de la première vraie guerre menée par la France depuis 1940. En général, on attend 50 ans pour avoir ce genre d’Inside. Là, la position de témoin privilégié de BHL fait qu’on les a presque tout de suite.
3. Bernard-Henri Lévy a tous les défauts du monde, mais il est honnête. Je veux dire par là que, tout en étant de gauche, tout en ayant fait campagne pour Royal et en s’apprêtant à faire campagne pour Hollande, il est honnête avec Nicolas Sarkozy et même empathique. Il raconte le chef de guerre, ses doutes, ses décisions. Il dit comment, contrairement à Giscard selon le mot fameux de Raymond Aron, il a le sens de l’Histoire tragique. Un Nicolas Sarkozy complexe. Un Nicolas Sarkozy inattendu. Un Nicolas Sarkozy aussi loin des partis pris de ses adversaires. Que ce portrait vienne d’un adversaire politique est un bon signe pour la démocratie.
4. Ce livre raconte une incroyable aventure humaine, celle de ce philosophe romantique lui-même aux prises avec les tumultes de l’Histoire. Levy a toujours aimé les guerres. A 20 ans, il répondait à l’appel d’André Malraux, l’un de ses modèles, pour voler au secours du Bangladesh, massacré par l’armée pakistanaise. A 40 ans, il tournait un film dans les tranchées de la guerre de Bosnie. Puis, on le retrouve aux côtés du Commandant Massoud, dans le Panchir. Là, aujourd’hui, il est sur les lignes de front de Libye, dans les tranchées encore. Il cite ses modèles qui sont les grands écrivains gaullistes et aviateurs, Romain Gary et André Malraux.
5. Et puis enfin, au-delà des révélations du livre sur la machine politique et la machine de guerre française, au-delà de la relation des nombreux entretiens avec le Président français et des révélations qui s’ensuivent, au-delà également du récit au jour le jour des évènements militaro-politiques en Libye, l’intérêt de cet ouvrage est le suivant : Pour la première fois dans la très longue histoire du rapport des intellectuels français au pouvoir politique, un intellectuel et un chef d’Etat ont eu partie liée. Ils ont fait œuvre commune, pour une action commune qui n’était rien de moins qu’une guerre ! La chose est absolument sans précédent dans les annales de l’histoire intellectuelle française, que ce soit pendant la guerre d’Espagne, la guerre d’Algérie ou les années Mitterrand. D’habitude, les intellectuels étaient des résistants contre les pouvoirs en place et contre leurs dérives (de Munich à la torture en Algérie et à l’abandon à Staline de l’Europe captive). Là, le renversement est de taille. Après Mitterrand refusant d’intervenir en Bosnie, après Chirac ne recevant pas Massoud, Sarkozy et BHL ont fait guerre “ensemble”, en vue du renversement d’une dictature. Cette alliance-là, ce mélange de l’eau et du feu, est, aussi, sans précédent.
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Par marialis2.2 le 9 Novembre 2011 à 05:27
Le prix Femina décerné à Simon Liberati pour "Jayne Mansfield 1967"
L'ouvrage "Jayne Mansfield 1967", paru chez Grasset, de Simon Liberati (photo) a décroché le prix Femina 2011. Par ailleurs, le Femina étranger a été décerné à l'écrivain américain Francisco Goldman, auteur de "Dire son nom" (Christian Bourgois).
Par Dépêche (texte)AFP - Le prix Femina a été décerné lundi à Simon Liberati pour "Jayne Mansfield 1967" (Grasset), méditation sur le destin de cette blonde plantureuse, sex symbol brisé par Hollywood, qui se voulut star, finit en bimbo trash, avant de mourir sur une route à 34 ans, le crâne broyé.
Le journaliste et romancier Simon Liberati a été choisi au 1er tour par le jury par 9 voix contre 3 à Colette Fellous pour "Un amour de frère" (Gallimard).
Le Femina étranger est allé à l'Américain Francisco Goldman pour "Dire son nom" (Christian Bourgois) et celui de l'essai à Laure Murat pour "L'Homme qui se prenait pour Napoléon" (Gallimard).
"Ce prix est d'abord pour elle, pour Jayne Mansfield", a dit Simon Liberati, interrogé peu après l'annonce du prix. "Je suis d'abord content pour elle qui a eu une féminité très contestée, beaucoup caricaturée, et qu'elle soit couronnée par un jury de femmes, c'est quelque chose qui me touche beaucoup", a-t-il ajouté.
Né le 12 mai 1960 à Paris, Simon Liberati a notamment collaboré aux magazines FHM et Grazia après des études à la Sorbonne.
A 44 ans, il publia son premier ouvrage, "Anthologie des apparitions" (Flammarion), son troisième roman, "L'hyper Justine", obtenant le prix de Flore en 2009.
Auparavant, le personnage de son deuxième livre, "Nada exist" (2007), était un photographe de mode, passé de la célébrité à la dérive. Déjà l'attraction de Simon Liberati pour la déchéance ?
L'auteur s'en défend: "Ce n’est pas la décadence de Jayne Mansfield qui me plaît, mais son énergie. Elle dénichait toujours l’argent pour assurer un train de vie énorme. Elle me fascine depuis mes 17 ans."
"De sa vie, on ne se souvient que de sa mort", dit-il.
Jayne Mansfield s’est tuée dans un accident de voiture le 29 juin 1967, la nuit, sur la route 90 entre Beloxi et La Nouvelle-Orléans. Collision frontale de sa Buick avec un semi-remorque. L'une de ses perruques blondes flottait sur une branche, d’où la légende tenace de sa décapitation.
Loin d'une biographie de star, l’écrivain commence son roman par une description clinique de l'accident. Ce n'est qu'après une quarantaine de pages que le lecteur apprend l'identité de la passagère dont le crâne a éclaté contre le pare-brise.
Sous sa plume, la vedette de "La blonde et moi" qui se rêvait rivale de Marilyn Monroe reprend vie, par fragments.
Cette femme au QI de 163 et au tour de poitrine de 107 cm n'a tourné que des navets, collectionné les mariages ratés, a eu cinq enfants de trois pères différents, a plongé dans l’alcool, le LSD et la névrose...
Dès 1966, c'est le début de la chute. Oubliée des studios, devenue presque chauve, elle en est réduite à se déshabiller dans des bouges sordides.
"Déchue de son statut de movie star, elle était devenue une gigantesque attraction foraine à la manière de Lola Montès", écrit Simon Liberati dans ce roman sur le crépuscule d'une bombe blonde travestie en pionnière du kitsch.
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Par marialis2.2 le 5 Novembre 2011 à 01:14
Publié le 03/11/2011 | 14:55
Alexis Jenni couronné par le Goncourt
Par Anne BRIGAUDEAU
Alexis Jenni, a été sacré du Goncourt 2011.
Photo C. Hélie/Gallimard2011, année faste pour Gallimard qui fête ses cent ans et décroche une fois encore le plus convoité des prixLe jury Goncourt a en effet couronné ce 2 novembre Alexis Jenni pour son premier roman,"L'art français de la guerre", par cinq voix contre trois à Carole Martinez pour sa seconde fiction, "Du domaine des murmures" ...soit 8 voix sur 10 pour Gallimard.
Un pourfendeur des guerres coloniales récompensé
Avec Alexis Jenni, les jurés Goncourt ont récompensé par le chèque symbolique de 10 euros un primo-romancier, un professeur de biologie lyonnais de 48 ans jusque là inconnu et un pourfendeur des guerres coloniales.
Que relate "L'art français de la guerre", roman de 600 pages qui alterne ironie (« en 1939, la France était prête à affronter dans d’excellentes conditions les batailles de 1915") , tendresse et scènes d’horreur ? L’amitié entre un jeune homme, le narrateur, et son professeur de dessin, Victorien Salagnon. Cet ancien officier des guerres coloniales, qui a trouvé dans l'art sa planche de salut, raconte à son disciple les guerres sales qu'il a menées, d'Indochine en Algérie.Alexis Jenni, qui avait essuyé"15 ou 17 refus" d'éditeurs" pour une première oeuvre en 2005, a mis cinq ans à rédiger celle-ci. "Cinq ans tranquille. J’étais désespéré, je me disais, de toute façon, ça ratera." Le voici désormais sur la première marche du podium, celle qui lui offre le prix Goncourt.
Le groupe Gallimard a remporté 7 Goncourt depuis l'an 2000Si le trio Galligrasseuil a vécu (le dernier Goncourt Seuil remonte à ...1988 avec Eric Orsenna pour "L'exposition coloniale"), la célébration du centenaire de la maison fondée par Gaston ne saurait faire oublier l'emprise de plus en plus marquée du seul groupe Gallimard sur le Goncourt.
La maison d'édition qui siège depuis juin dans une rue à son nom en a obtenu cinq depuis l'an 2000, sous l'étiquette Gallimard (2000 : Jean-Jacques Schuhl pour "Ingrid Caven", 2001: Jean-Christophe Rufin pour "Rouge brésil", 2006 : Jonathan Littell pour "Les bienveillantes", 2009 : Marie NDiaye pour "Trois femmes puissantes, 2011 : Alexis Jenni). Mais sept si l'on parle du groupe (aux cinq précédents, il faut rajouter les Goncourt décernés en 2007 à Gilles Leroy pour Alabama Song, publié au Mercure de France, et en 2008 à Atiq Rahimi pour "Syngué Sabour Pierre de Patience" chez POL).
Quoi d'étonnant au demeurant ? Sur les dix membres du jury Goncourt, plusieurs sont ou ont été des auteurs Gallimard (Régis Debray, Françoise Chandernagor, passée depuis à Albin Michel, Jorge Semprun, Tahar Ben Jelloun...).
Emmanuel Carrère remporte le prix Renaudot
La journée du 2 novembre 2011 a été faste pour la maison Gallimard puisque sa filiale P.O.L. a été récompenséepar le prix Renaudot, attribuée à Emmanuel Carrère pour son Limonov (P.O.L), portrait du sulfureux Edouard Limonov, idole underground sous Brejnev, clochard à New York, écrivain branché à Paris et fondateur d'un parti ultranationaliste en Russie. L'écrivain, qui faisait lui aussi figure de favori pour ce prix convoité, a été choisi par le jury au deuxième tour.
>> Lire aussi :"L'art français de la guerre", roman convaincant
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Par marialis2.2 le 3 Novembre 2011 à 00:32Dernière modification : 02/11/2011
Le Goncourt, cirque médiatique ou prix littéraire de prestige ?
L’attribution du plus prestigieux des prix littéraires français fait chaque année l'objet d'une couverture médiatique quasi frénétique. Sans que l’on comprenne toujours la pertinence de cette récompense...
Par Guillaume GUGUEN (texte)"Pour une fois que le Goncourt honore un Jenni…" La plaisanterie fuse sous les lustres du très sélect restaurant Drouant, à Paris, où le jury du Goncourt vient de décerner, ce mercredi 2 novembre, son prix à "L’Art français de la guerre " (Gallimard), premier roman d’Alexis Jenni. Des quolibets, la célèbre récompense littéraire française en essuie chaque année. Médiatisation excessive, académisme ronflant, copinage à peine voilé… les griefs formulés à l’encontre de l'illustre prix sont légion mais n’ont jamais réellement entamé la frénésie médiatique que suscite son attribution.
Comme ses récents prédécesseurs, le lauréat 2011 a été accueilli par une horde de journalistes lors de son arrivée au restaurant Drouant. Il semble loin le temps où l'attribution du premier Goncourt, en 1903, faisait seulement l'objet d'une courte brêve dans Le Figaro...
Soudainement érigé au rang de star littéraire, Alexis Jenni, professeur de biologie lyonnais âgé de 48 ans, assure aux micros qui lui sont tendus être "extrêmement fier et heureux de passer comme cela d'un premier roman à ce prix prestigieux". Et d’ajouter : "J'ai mis cinq ans à écrire ce livre, il me faudra un peu de temps pour réaliser."
Suiveur
Cet "écrivain du dimanche", comme il se définit lui-même, était pourtant donné gagnant depuis des semaines. Pour nombre de critiques, "L’Art français de la guerre" avait tout du Goncourt idéal. À mi-chemin entre le récit de guerres (celles que la France mena en Indochine et en Algérie) et le pamphlet politique (débat sur l’identité nationale), le premier roman d’Alexis Jenni est l’un des best-sellers de la rentrée littéraire (il s’est déjà vendu à 56 000 exemplaires). Un accueil favorable qui n’est sans doute pas étranger à l’attribution du prix. "Depuis plusieurs années, le Goncourt capitalise sur un succès critique et public déjà existant, commente Augustin Tapenard, chroniqueur littéraire à FRANCE 24. Ce fut le cas avec Marie NDiaye en 2009 et Michel Houellebecq en 2010."
Autrefois défricheurs de talents, les jurés de la célèbre récompense semblent s’être résignés à jouer les suiveurs. "Dans ce contexte difficile pour le marché du livre, le Goncourt a lui aussi besoin de visibilité s’il veut conserver tout son prestige", affirme Augustin Tapenard. Aussi les Sages préféreront-ils couronner un livre déjà bien en vue sur les étals plutôt qu’un roman oublié dans les cartons des libraires.
Prescripteur
Alexis Jenni aiderait-il donc davantage le Goncourt que l'inverse ? Pas si sûr. "Ce prix demeure un formidable démultiplicateur de ventes", observe Bernard Lehut, chroniqueur littéraire à RTL. Un livre arborant le fameux bandeau rouge "s’écoule, en moyenne, à 400 000 exemplaires". "C’est comme un prix Nobel que l’on attribue à un écrivain français qui aura ensuite la chance d’être traduit à l’étranger", abonde Pierre de Vilno, animateur de l’émission "Café culture" sur Europe 1. Même son de cloche chez Mohammed Aissaoui, journaliste au Figaro Littéraire : "Le Goncourt peut faire vivre une maison d’édition pendant trois ans."
Seulement voilà, rares sont les maisons d’édition qui peuvent se targuer d’avoir glané le précieux sésame. Accusés de ne récompenser que les grands groupes (Gallimard, Grasset, Le Seuil), les Sages du Goncourt se sont une nouvelle fois exposés aux reproches de leurs détracteurs, qui voient dans ce prix 2011 un cadeau offert au centenaire Gallimard. "Sans doute le fait d’être publié l’année où la maison fête officiellement son centième anniversaire, n’était-il pas le pire des handicaps", écrit le critique Grégoire Leménager sur le site du Nouvel Observateur à propos du livre d’Alexis Jenni.
Le nouveau Goncourt n’en demeure pas moins une "œuvre exigeante", juge Augustin Tapenard. "Sur les quatre finalistes, c’est le choix le plus juste. ‘Le roman de Jenni est une œuvre qui capte parfaitement l’essence de la France." Un enthousiasme qu'est loin de partager Nelly Kapriélian, critique à l’hebdomadaire Les Inrocks : "L’Art français de la guerre" est "un roman qui semble tellement conçu comme de 'l’attrape-Goncourt' (la guerre, l’histoire, le sérieux obligé, l’académisme de l’écriture, l’épaisseur du volume, la couverture de la Blanche...) qu’on se demande comment le jury du prix a même pu tomber dans un tel piège..."
Le premier roman d'Alexis Jenni, grand favori du Goncourt
Le jury du Goncourt, le plus prestigieux des prix littéraires français, dévoilera mercredi le nom du lauréat 2011. Sur les quatre auteurs en lice, Alexis Jenni (photo), avec son premier roman "L'Art français de la guerre", part favori.
Par Dépêche (texte)AFP - Qui décrochera le Goncourt 2011, le plus prestigieux des prix littéraires français et machine à best-sellers ? Difficile de ne pas déjà l'attribuer à Alexis Jenni, dont le premier roman est couvert d'éloges. Mais rien n'est joué. Le suspense sera levé mercredi à 13H00.
C'est à cet instant redouté par les quatre prétendants que la présidente du jury, Edmonde Charles-Roux, annoncera le nom du lauréat, après avoir débattu avec ses pairs dans un salon feutré du sélect restaurant Drouant.
Dans le même temps, chez Drouant, les jurés du Renaudot dévoileront leur champion parmi quatre concurrents, eux aussi sur des charbons ardents.
Outre Alexis Jenni, l'auteur du superbe "L'Art français de la guerre", publié chez Gallimard qui fête cette année son centenaire, les prétendants au trône du Goncourt s'appellent Sorj Chalandon, déjà sacré jeudi par le Grand prix du roman de l'Académie française, Carole Martinez, également chez Gallimard, et Lyonel Trouillot, écrivain haïtien édité par Actes Sud.
Longtemps, Alexis Jenni a écrit "pour se faire plaisir", entre deux cours donnés au lycée, et se considérait jusqu'ici comme "un écrivain du dimanche". Cet agrégé de biologie de 48 ans n'a pourtant jamais cessé d'écrire, mais "de petites choses", dit-il, restées dans ses tiroirs.
"Je suis modeste, c'est un handicap un peu ridicule, je sais", écrit Jenni sur son blog dessiné, "Voyages pas très loin".
Pourtant, "L'Art français de la guerre", premier roman publié de ce professeur lyonnais, envoyé par la poste à un seul éditeur, Gallimard, a fait l'effet d'une bombe. Et pourrait le propulser au sommet.Certains critiques ont même cru à un nouvel Emile Ajar. "Jenni" ? Trop beau pour être vrai. Ce doit être le pseudonyme d'un auteur connu...
Guerres coloniales
C'est pourtant bien le véritable nom de ce père de trois enfants aux origines suisses-allemandes que trahit sa blondeur striée de blanc, cheveux en bataille et barbe de trois jours. Son grand art est bien le sien.
Dans sa fresque de 630 pages, épopée épique entre Indochine et Algérie, il enchaîne les scènes de combats poisseuses, charnelles, évoque l'omniprésence des vingt ans de guerres coloniales dans les esprits d'aujourd'hui, questionne l'identité nationale.
De rares auteurs ont déjà décroché le Goncourt avec un premier roman, dont Jonathan Littell, en 2006, avec "Les Bienveillantes".
N'oublions pas les autres "goncourisables".
Avec "Retour à Killybegs" (Grasset), Sorj Chalandon s'est replongé dans l'Irlande du Nord et la douleur de la trahison, déjà au coeur de son roman "Mon traître".
Romancier et poète, Lyonel Trouillot met en scène dans "La belle amour humaine" un dialogue décalé entre un Haïtien et une jeune occidentale, en quête de réponses sur son père qu'elle a à peine connu.
Recréant la féerie de son premier roman "Le coeur cousu", plébiscité en 2007, Carole Martinez prête sa voix, dans "Du Domaine des Murmures", à une jouvencelle du Moyen-Age qui se fait emmurer vivante pour se donner à Dieu, mais que la fureur du monde rattrapera.
Quatre auteurs sont en lice pour le Renaudot : Emmanuel Carrère, qui brosse avec maestria dans "Limonov" (P.O.L) le portait de cet écrivain russe sulfureux devenu leader ultranationaliste, dont la vie ressemble à un roman d'aventure.
Eric Reinhardt dépeint dans "Le Système Victoria" (Stock) la liaison torride et vénéneuse entre une femme d'affaire et un architecte. Morgan Sportès s'attaque au Gang des barbares avec "Tout, tout de suite" (Fayard) et Shumona Sinha à l'immigration dans "Assommons les pauvres !" (L'Olivier).
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