Rien n'est encore officiel. Mais Jean-François Copé et François Fillon le chuchotent : il n'y aura probablement pas de nouvelle élection interne pour la présidence de l'UMP en septembre. L'organisation de ce scrutin était pourtant la pierre angulaire de l'armistice signé le 17 décembre entre les deux rivaux. Mais, aujourd'hui, ni l'un ni l'autre n'ont intérêt à se lancer dans l'épisode 2 de la guerre des chefs. "Copé est déjà président du parti, il reste très bas dans les sondages et doit soigner son image. Et les procurations sont désormais interdites", souffle un proche. On se souvient qu'en novembre dernier les copéistes s'étaient surpassés en réunissant quelque 30 000 procurations (contre 10 000 pour les fillonistes) !
Du côté de Fillon, on constate que le clan Copé reste très efficace dans les fédérations et que bon nombre d'adhérents fillonistes n'ont pas renouvelé leur carte pour 2013. "Fillon ne sera pas candidat en septembre. Il a obtenu de Copé une primaire ouverte en 2016 moralement encadrée, et les nouveaux statuts sont sur le point d'être bouclés : voilà l'essentiel", conclut-on dans son entourage. Copé est soucieux de ne pas passer en force tandis que son rival veut éviter les procès en lâcheté. De toute façon, d'autres arguments plaident en leur faveur : les adhérents du parti sont encore traumatisés par le psychodrame de l'automne et ne veulent pas entendre parler d'un nouveau vote. Sans compter les difficultés financières du parti (sa dotation publique annuelle est passée de plus de 33 millions d'euros à un peu plus de 20 millions d'euros à cause des mauvais résultats électoraux) qui pourraient s'aggraver si le rejet des comptes de campagne de Sarkozy était confirmé par le Conseil constitutionnel.
"Copé devra endosser l'explosion de l'UMP"
Certes, une telle décision sera critiquée, notamment par les ambitieux Nathalie Kosciusko-Morizet, Laurent Wauquiez ou Bruno Le Maire qui reprochent déjà à Copé et Fillon leur gestion de l'UMP à deux "en copropriété". Et certains lieutenants de l'ancien Premier ministre laissent s'exprimer leur déception. "La légitimité de Copé n'est pas reconnue, il faut un nouveau vote, mais il n'y en aura probablement pas", souffle le député François Baroin. Et de poursuivre : "J'ai moi-même refusé d'être candidat pour des raisons personnelles et pour que Fillon prenne ses responsabilités de leader."
Un proche du député de Paris relativise : "L'UMP peut se déchirer aux élections municipales et/ou aux régionales, car Jean-François Copé n'exclura pas ceux qui feront des alliances avec le FN. Copé devra endosser l'explosion de l'UMP." Même si Fillon refuse pour l'heure de se laisser "dicter son calendrier", il y a fort à parier qu'il s'assiéra sous peu à la même table que Copé pour signer un deuxième accord. La paix armée est partie pour durer !
Divorce sur le mariage gay
D'autant plus que les récents débats sur le mariage gay ont mis en lumière une véritable ligne de fracture au sein de l'UMP entre d'une part les "modérés", tels que François Fillon ou Bruno Le Maire, et d'autre part les "ultras" comme Jean-François Copé, Henri Guaino ou Laurent Wauquiez, attachés à la défense des valeurs traditionnelles. L'UMP est tout aussi partagée sur ce qu'elle entend faire de la loi si elle revient au pouvoir en 2017 : abrogation, réécriture ou référendum ? Rien n'est arrêté. Enfin, la participation du parti à La Manif pour tous prévue le 26 mai divise les deux rivaux Copé et Fillon.
"Je souhaite que la manifestation du 26 mai prochain, même postérieure au vote de la loi, soit une manifestation politique de non global au gouvernement", insiste Jean-François Copé dans une interview à Valeurs actuelles. Ce à quoi François Fillon répond dans les colonnes du Figaro Magazine en émettant des "réserves". "La dernière chose dont la France a besoin aujourd'hui, c'est d'une crise institutionnelle. Le rôle de l'UMP, c'est de préparer l'alternance, pas de pousser les Français dans une contestation passionnelle", souligne l'ancien Premier ministre. Bref, les questions du leadership et de la ligne politique pourraient bien agiter le parti jusqu'en 2016.